Scènes

Paolo Fresu quartet à Aix-en-Provence

Un jazz « terriblement d’accord »…


Un jazz « terriblement d’accord »…

Bons musiciens, bon public, bonne soirée… C’est vrai, il faudrait être mauvais coucheur pour ne pas apprécier un concert comme celui donné ce 8 février 2011 au Grand Théâtre d’Aix-en-Provence par Paolo Fresu et son quartette. Tout était nickel propre, et à vrai dire assez surjoué, à l’image du recours abusif à deux machines infernales : l’une à produire de la fumée sans fin - on aurait dit la Durance quand elle a ses vapeurs - l’autre à triturer du son électronique, sorte de cinquième élément d’un quintette sans génie.

Fresu, entendons-nous, ne manque pas de talent. En plus d’être beau gosse, de bien parler le français en mode sarde, et de plaire aux dames. Le gendre idéal. D’ailleurs ma voisine se pâme, celle qui avait tant détesté le passage de Steve Coleman sur la même scène. Et c’est le même public qui, ayant - à peine poliment - éconduit le saxophoniste, ovationne le bugliste, obligeamment tenu à deux rappels…

Photo Gérard Tissier/DR

Soit. Ce fut donc un bon concert. Passer un bon moment, après tout, ce n’est pas rien, par ces temps si secoués et incertains. Et le jazz là dedans ? Eh oui, telle est la question. Serait-il devenu cette sage musique d’apéro-concert ? Où est l’éternelle aventure, inclassable parce que sans cesse réinventée ? Vous entendez d’ici le grincement de mes réflexions tandis que Paolo assure en bon pro, au nom de son « Devil Quartet ». « Quartet d’enfer » voudrait-il prétendre derrière l’intitulé présomptueux ? Rien de diabolique ici, ou alors seulement cette machine à échantillonner, ce mastic électronique. Un bidule ne fait pas le Zawinul. Et quand Miles est passé à l’électricité, son brouet de sorcières (Bitches Brew) n’avait rien d’une soupe bourrative ; c’était plutôt l’anti-somnifère du jazz.

Ce qui m’amène à reprendre les propos tenus dans Jazz Magazine/Jazzman (février 2011), par Sylvain Kassap au sujet du jazz contemporain : « Si à un moment je me suis mis à jouer cette musique c’est, pour le résumer d’une formule, que « je n’étais pas d’accord »… Or, très souvent, quand j’entends la musique que proposent les musiciens d’ aujourd’hui je trouve qu’« ils sont terriblement d’accord »…

Photo Gérard Tissier/DR

Paolo Fresu, bu, tp ; Roberto Cecchetto, elg ; Paolino Dalla Porta, b ; Joël Allouche, dm