Scènes

Paysage après l’orage, de Josef Nadj


- Samedi 6 septembre

Belle présence de la danse dans la programmation de Jazz à la Villette cette année. Après Anne Teresa De Keersmaeker et Boris Charmatz, et avant Mathilde Monnier la semaine prochaine, c’était autour de Josef Nadj d’occuper la scène de la Grande Halle, cette fois-ci dans la salle Boris Vian. Sa pièce, Paysage après l’orage, s’inspire de souvenirs de sa Voïvodine natale mis en musique par Akosh Szelevényi et Gildas Etevenard.

Les deux musiciens entrent seuls en scène et s’acharnent sur une cage métallique qu’ils percutent et frottent pour en tirer des sons martiaux et inquiétants. Au son de cette étrange incantation chamanique naît un animal mystérieux, comme sorti de terre, affublé d’un bec rouge. C’est Nadj, qui semble en lutte perpétuelle avec son propre corps, mal apprivoisé. Ce corps, traversé de forces contraires, entre tentatives de maîtrise et soumission aux éléments surnaturels, est au cœur du spectacle. La musique, en s’abreuvant aussi bien de sonorités traditionnelles magyares que de la véhémence du free jazz, entre en résonance avec cette lutte très physique. Empruntant au langage corporel animal aussi bien qu’au vocabulaire des arts martiaux, ou mettant en avant sa musculature soumise à rude épreuve, Nadj évoque ces ciels bas, encore anthracites, qui pèsent sur la grande plaine pannonienne. Pas d’arbre à l’horizon, juste des herbes folles à perte de vue, brûlées par la chaleur de l’été, et soudainement figées par un climat changeant. Le retour à la vie, difficile, s’apparente à un combat contre la nature. Il y a une certaine violence, parfois rentrée, dans la peinture de ce paysage.

L’association avec Akosh S. n’est pas nouvelle pour Nadj, mais elle prend tout son sens dans cette évocation poétique de racines communes, où le vocabulaire de chacun inspire l’autre. Les couleurs trouvées par Akosh sur la clarinette métal ou les saxophones répondent aux climats changeants du paysage et de la danse. L’utilisation d’objets scéniques et vidéo apporte quelques touches d’humour d’une poésie naïve, presque enfantine. Échos des souvenirs d’un paysage laissé là-bas, du côté de l’enfance.