Chronique

Rigolus

Premier album !

Thomas de Pourquery (as, ss, voc), Laurent Bardainne (ts, voc), Sylvain Rifflet (bs, ss, fl, voc), Stéphane Decolly (b), Nicolas Larmignat (dm, perc), Gaël Chosson (dm, perc), Les Rigolettes

Label / Distribution : Chief Inspector

Rigolus, fanfare autoproclamée au goût d’anis, sort enfin son premier disque. Enfin, oui, car la renommée croissante de ces joyeux drilles - faite de bouche à oreille, de clic à courriel, et pas uniquement dans la capitale - méritait une plus ample diffusion de leur concentré de déconnades, envolées lyrico-parodiques et thèmes imparables.

L’auteur de ces lignes n’a certes pas encore eu la chance d’assister à un de leurs fameux concerts, réputés tonitruants et propices à la libération des énergies corporelles [1]. L’écoute de cette très bonne galette reste cependant le meilleur argument objectif pour s’y rendre à grands pas. On pourra laisser le soin au lecteur de trancher cette épineuse question : faut-il les voir d’abord pour mieux les écouter ensuite ?

Commençons peut-être - inhabituellement - par la fève « Envie de toi », dix-septième et dernier titre. Ce morceau assez emblématique croque sous la dent, c’est sûr, avec une consistance bien différente des autres - attention, il faut le mordre en douceur. Le côté disco, la mélodie entêtante reprise en choeur sont des candidats crédibles à l’intervention télé, au tube hexagonal et - après tout - à un succès mérité [2]. Néanmoins, le reste ne déroutera pas le mélomane de base, qu’il soit crispé du swing ou onaniste du lobe auditif.

Bien au contraire, comment résister à ce tsunami de jubilation déclenché par les trois pilliers et compositeurs Thomas de Pourquery, Laurent Bardainne et Sylvain Rifflet ? Une jubilation qui prend grosso modo deux formes :
L’aspect parodique serait incarné par de Pourquery (dont on connaît la propension naturelle à la déconnade). Ses huit compositions sont, pour la plupart, chantées par lui-même ou avec les Rigolettes ; citons, pour leurs titres éloquents : « Machiavelika Portugal », « Bouse à Bush », « Rifflus actif ». Pour autant, la musique ne cède jamais à la facilité, notamment sur un fantastique « Finger in the Freezer », avec Elise Caron dans le rôle de l’actrice américaine qui découvre… un doigt dans son frigo ! Les arrangements frappadingues, la construction narrative du morceau rappellent tout de suite certains délires de Frank Zappa.

L’autre aspect jubilatoire de Rigolus est représenté par Laurent Bardainne - et dans une moindre mesure Sylvain Rifflet - avec des compositions plus directes, héritées d’une certaine tradition populaire : fanfares de l’est (« Dave »), valse kurtweilienne mélancolique (« Ich Bin Müde ») et même évocation des Swinger Singers à travers le chant des Rigolettes (« Anis Canyoning »).

Rigolus ne révolutionnera peut-être pas la scène musicale française ni internationale (encore que…). Mais lorsque le ciel bas et pollué pèse comme une matraque, cette bande de joyeuses trilles ne peut, ne veut que nous faire du bien.

par Julien Lefèvre // Publié le 29 janvier 2007
P.-S. :

(Sortie le 25 janvier 2007)

[1Ce dont on peut se rendre compte en regardant quelques vidéos sur leur site.

[2Signalons ainsi le passage de Rigolus à l’émission « Le fou du roi » sur France Inter le 1er février.