Chronique

Trio Initiatives

Initiatives

Jean-Christophe Cholet (p), Gildas Boclé (b), Quentin Cholet (dms)

Label / Distribution : Infigo

Lorsqu’il est en trio, une forme qu’il affectionne particulièrement, le pianiste Jean-Christophe Cholet a besoin de proximité. Qu’importe la forme prise ; elle peut être liée à une complicité ancienne, celle qui permet de se trouver en un regard, comme c’est le cas avec le trio CKP avec lequel il a enregistré de nombreux albums. Cela peut-être relié à l’intime, comme Initiatives, où l’on retrouve le contrebassiste Gildas Boclé (qu’on a notamment pu entendre avec Olivier Ker Ourio) et surtout Quentin Cholet, dont il ne faudra pas longtemps pour comprendre qu’il y a un lien de parenté. Passé par l’Allemagne où il a travaillé avec John Hollenbeck, ce qui se ressent sur le fort sensible « Cahire », qu’il signe et habille d’une rythmique à la fois retorse et colorée, le batteur est certes jeune mais déjà à maturité.

Bon sang ne saurait mentir. Il y a entre le père et le fils une connexion qui ne se résume pas simplement aux liens familiaux. Certes, l’élégance est un trait commun, mis en valeur dans « Nonobstant ». Dans ce morceau très court, le toucher paternel, fine ondée perlée par une mousseline de main droite, s’amalgame avec les effleurements de cymbales. Puis une percée plus souterraine est embrassée par une frappe franche. Il faut compter dans ce cas sur Boclé pour couper le cordon avec un tact qui n’empêche pas une forme d’autorité. C’est le secret de l’équilibre de ce trio. Il ne faut cependant pas songer que les Cholet s’offrent des fleurs ; « Le cœur qui mue », écrit à deux mains par Quentin et Jean-Christophe, est une belle passe d’armes où la tension est palpable, sans néanmoins virer aux heurts frontaux qui feraient tirer les mouchoirs. Les musiciens sont libres et aucunement redevables, et même lorsque cela paraît turbulent, tout est joué avec une grande douceur.

Les pièces d’Initiatives sont souvent courtes mais excluent le format chanson. Comme toujours avec le pianiste, l’atmosphère est crépusculaire sans pour autant être funèbre. Ce n’est pas la nuit, même s’il fait bon lui rendre hommage. L’ensemble du disque s’inspire de cet entre-deux où tout s’estompe, voire s’embrume et où il ne reste qu’un mélange enivrant d’excitation et de langueur. Les deux parties de « November » en sont le parfait témoignage ; l’archet de la contrebasse maintient ce tendre balancement. Homme d’image (il est aussi un photographe réputé), Gildas Boclé retranscrit fidèlement le clair-obscur de ce trio qui dépasse aisément le cadre du portrait de famille. Un disque chaleureux.