Scènes

À Vaulx Jazz 2007

Vendredi 23 mars, le blues envahit la scène d’A Vaulx Jazz. Du coup, les découvertes jazz se réfugient chez « Agapes », une étonnante structure qui depuis vingt ans, fait son ordinaire du jazz le moins convenu. Explications.


Au moment de clore la 20ème d’A Vaulx Jazz, vendredi 23 mars, on a le choix : ou bien la soirée « Blues » un poil inévitable dans tout festival ou bien un concert dans lequel se retrouvent en ordre dispersé Denis Badault et Olivier Sens mais aussi Imuzzic, où figurent Rémi Gaudillat, Lionel Martin, Fred Roudet et Bruno Tocanne, plus Quensin Nachoff, un Canadien invité dont on ne dit que du bien.

Ce concert-ci prend la tangente. Même s’il figure au cœur d’A Vaulx Jazz, il se déroule en fait quelque part entre Lyon et Bron, dans une « Salle Genton », petit lieu étonnant de 200 places où le spectateur se trouve, dans le plus grand confort, nez à nez avec ceux qu’il est venu écouter.

C’est là qu’est installée depuis quelques temps déjà, « Agapes », une petite structure emmenée par un certain Yves Bleton et qui n’aime rien tant que d’aller chatouiller le jazz dans ses confins. De lui rajouter une épice ici, une saveur venue d’ailleurs là, dans l’idée que, de ces alchimies, naissent des trucs complètement sidérants.

Un exemple parmi d’autres, ce concert qui en novembre mêlait jazz et musique traditionnelle de l’Inde du Sud. Côté Jazz, avaient été mobilisés Les Emeudroïdes, quartet de jazz et musiques improvisées compreneant Clément Canonne au piano, synthé, Roméo Monteiro aux batterie, percus, Nicolas Nageotte aux sax, clarinettes et Joris Ruhl : clarinettes. De l’autre les Musiciens du Kerala Kathakali Center. A la guitare, en invité, Damien Cluzel.

On sait ce qui guette de telles rencontres ou confrontations, organisées avec la meilleure volonté possible mais qui se limitent souvent à une juxtaposition laborieuse de musiques qui n’ont rien à se dire. Cette fois-ci, malgré un premier morceau qui fit craindre une telle issue, on eut droit à un véritable concert jazzeux-indien où instruments et inspirations se mêlaient d’étonnante façon pour inventer autre chose, chacun se nourrissant de l’autre.

De telles rencontres, Agapes ne cesse d’en organiser année après année, allant toujours un peu plus loin à la découverte d’autre chose dans le champ improvisé. Il y a quelques semaines, ce fut au tour de Micromegas de se présenter dans des configurations différentes (on recommande : un concert avec Portal est dans les tuyaux ces jours-ci à Grenoble). Et la semaine passée c’était au tour de Damien Sabatier de se retrouver avec une sorte de « Carte Blanche » le temps d’une soirée.

Ce jeune musicien typique d’une génération qui a tout avalé pour se faire son propre patrimoine jazzy, désormais « pensionnaire » de la Marmite Infernale, n’a pas été en reste pour sauter à pieds joints d’un style à l’autre, finissant sur une sorte de rock band soul mahousse où Coltrane n’aurait certes pas retrouvé ses petits mais qui ne laissait surtout pas indifférent.

Bref, à qui le tour ? Les soirées d’Agapes, démarrées il y a près de trente ans, continuent leur cheminement exploratoire. Cette fois, la salle Genton sert de valeur refuge à « A Vaulx Jazz ». Pourquoi pas : dans cette petite salle à l’écart de tout, flotte entre autres comme un parfum de clandestinité qui augmente la saveur du lieu et de ce qu’on y concocte.