Chronique

Charlie Haden/Liberation Music Orchestra

Time/Life (Song For The Whales And Other Beings)

Carla Bley (p, arr, dir), Charlie Haden (b on 1 & 5), Steve Swallow (el-b on 2, 3 & 4), Michael Rodriguez, Seneca Black (tp), Curtis Fowlkes (tb), Vincent Chancey (fr-h), Joseph Daley (tu), Loren Stillman (as), Chis Cheek, Tony Malaby (ts), Steve Cardenas (g), Matt Wilson (dm)

Label / Distribution : Impulse !

Charlie Haden était une voix. On s’en rend compte dès qu’il intervient en solo dans le premier morceau de l’album « Blue In Green », et à l’émotion de ce qu’il raconte s’ajoute celle de savoir que cette voix s’est tue pour toujours. L’arrangement de Carla Bley prend le temps des nuances, accélérations et degrés dans l’éclat des cuivres, et ne contribue pas peu à une écoute soutenue. On retrouve le contrebassiste et leader dans le dernier morceau, enregistré « live » lui aussi, « Song For The Whales », après que - mais en studio - trois pièces se soient succédées avec Steve Swallow à la basse électrique. Et ce chant pour les baleines est introduit par un solo à l’archet qui évoque très directement les dialogues enregistrés de ces grands mammifères marins, qui prennent aujourd’hui, dans nos pensées contestataires et résistantes, la place occupée naguère par les leaders politiques et révolutionnaires (« Song For Che »)

Ces trois morceaux sont de la plume de Carla Bley, ils portent sa marque, son art des modulations, et le ton général qui est le sien, entre mélancolie (pouvant toucher au funèbre [1]) et révolte. « Silent Spring » est, à cet égard, exemplaire. Tony Malaby et Chris Cheek prennent une belle part à l’ouvrage, et le son d’ensemble reste bien celui du LMO. On découvre aussi un brillant Loren Stillman à l’alto. Proche parfois du crépusculaire, ce disque est un adieu au LMO et à Charlie Haden, tout à fait dans la lignée de ce qu’il aurait pu souhaiter, et de ce que nous avons envie d’entendre maintenant.

par Philippe Méziat // Publié le 20 novembre 2016

[1Il faut dire que l’enregistrement a eu lieu le lendemain de la cérémonie d’adieu à Charlie Haden