Chronique

Daniel Casimir

Eros et Thanatos

Quatuor Ebène, François Moutin (b), Michael Felberbaum (g), Nicolas Genest (tr, bgl), Fred Borey (ts), Vincent Courtois (cello), Daniel Casimir (trb)

Label / Distribution : Yolk Records

Un peu plus de deux ans ont été nécessaires à Daniel Casimir pour concevoir, écrire, enregistrer et publier ce projet. Le tromboniste, ancien membre de la section cuivre du Groove Gang, leader du Wonder Brass Factory, pilier du Thuillier Brass trio et sideman apprécié recèle un compositeur délicat et inventif.

Treize compositions originales (dont certaines déjà interprétées en duo avec Michael Felberbaum) forment l’ossature de cette œuvre satellitaire.

L’utilisation de cordes dans le jazz est risquée. De nombreux dérapages incontrôlés ont été à l’origine de disques mielleux et ratés. Par contre, dès qu’une écriture intelligente et tenue encadre et stimule les archets, l’orchestre à cordes devient un interlocuteur privilégié.
Ici, Daniel Casimir a su utiliser avec ingéniosité les sonorités particulières du Quatuor Ebène en les associant à celles du jazz ensemble, lui-même composé de cordes et de cuivres ; pour un peu on sent les violons swinguer.

Sans batterie, sans piano, la musique prend une dimension aérienne (glissandi à l’archet et au trombone, pizzicati). Aucune hiérarchie musicale n’apparaît. Il ne s’agit pas ici d’un disque avec un tromboniste comme leader, mais bien d’un orchestre de jazz compact et fulgurant dont le maître d’œuvre y joue en plus du trombone. Tous les pupitres sont en interaction. Il en ressort une impression agréable de flottement.

Les thèmes, propres à l’univers romantique de ce citoyen du monde, sont autant de mélodies délicates et ciselées, à la respiration régulière.

On retrouve avec plaisir le jeu calme et singulier du guitariste Michael Felberbaum sur « Eros et Thanatos », un solo de violoncelle extraterrestre de Vincent Courtois sur « Train Of Thoughts », une intro déglinguée de François Moutin à la basse sur « Till The Thrill », les arabesques de Nicolas Genest à la trompette ou encore une orchestration épileptique sur « Adventuresome Sophie »…

Parce que ce disque a été conçu patiemment, intelligemment et que les thèmes se suivent, se répondent et forment un tout cohérent, Daniel Casimir peut s’enorgueillir d’avoir réalisé un petit chef-d’œuvre.