Chronique

François de Larrard & Mathieu Bec

Floating

François de Larrard (p), Mathieu Bec (d)

Label / Distribution : Mazeto Square

Il y a treize ans, un disque arrivait sur nos platines, propulsé par le label Yolk, et nous faisait (re)découvrir le pianiste François de Larrard. Avec Zoo, qui avait conquis beaucoup de monde, on rencontrait un pianiste sensible, dont la discrétion se sentait jusque dans son jeu, fait d’économie de gestes et de douceur. Plusieurs années plus tard, c’est en duo qu’on le retrouve, en compagnie d’un autre artiste très sensible, le batteur Mathieu Bec, entendu il y a peu avec Daunik Lazro. Très coloriste, le drumming de Bec se marie idéalement avec le jeu de son compagnon : « Vagabondage harmonique » en est un véritable symbole, avec cette main droite rapide qui baguenaude, pendant que la batterie évolue tout en souplesse.

Plus loin, avec « Petit matin lyonnais », le pianiste se fait plus nostalgique, il y a quelque chose du cœur des faubourgs dans cette ballade populaire que Mathieu Bec accroche avec une caisse claire effleurée, comme les pas d’une danse. À chaque instant, on sent une détermination, voire une colère qui gronde sans jamais éclater, privilégiant une forme d’élégance. Ce qui est plaisant dans ce Floating, c’est le choix délibéré du duo de ne pas favoriser les envolées solistes. Tout reste simple, sans effets de manches, entièrement consacré à l’interaction entre le piano et la batterie, à l’image de « Chromatic Walk », sans doute le morceau le plus vif de cet album, où la main gauche de Larrard se charge d’une walking bass pendant que sa main droite fouille dans des complexités bondissantes.

Entièrement dédié à l’improvisation la plus libre, ce disque de François de Larrard et Mathieu Bec est un bel échange fait d’harmonie et de complexité, où l’élégance est une des rares conditions à l’échange. Si le langage véhiculaire entre les musiciens est intrinsèquement le jazz, on entend de-ci de-là des influences satiennes voire debussyennes jusque dans les silences (« Au creux de ton oreille »), et certaines mécaniques à l’œuvre ont des reflets très contemporains. Cette rencontre inattendue, comme souvent chez Larrard, se fait sous les meilleurs auspices.

par Franpi Barriaux // Publié le 12 août 2024
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