Chronique

Unik Ubik

I’m not Feng Shui

Seb Delay (g, voc), Thom D’Hallewin (dms), T. Raznor (b, voc), JB Rubin (sax) + G.W. Sok (voc)

Label / Distribution : Humpty Dumpty Records

Chez Philip K. Dick, l’Ubik est une bombe aérosol qui, dans une sorte de monde parallèle/purgatoire, prolonge la vie de ce qui va bientôt disparaitre (individus ou objets). Inutile dorénavant de lire le livre, ça ne présente plus aucun intérêt : je vous l’ai grossièrement spoilé (dans une prochaine chronique je vous parlerai de Kaiser Soze/Kevin Spacey dans Usual Suspects). C’était pourtant un préalable indispensable à l’évocation du dernier album des Franco-Belges Unik Ubik parce que le groupe porte bien son nom.

Dès les premières secondes, le riff du saxophone et de la guitare assoit sans ambiguïté la filiation de l’orchestre avec The Ex. Le chanteur historique du groupe néerlandais, G.W. Sok, est d’ailleurs l’invité d’honneur d’une plage du disque. Le son acidulé de saxophone et la place singulière de JB Rubin rappellent John Lurie et ses Lounge Lizards. Le groupe sautille avec aisance, sincérité et jubilation du métal à la reprise no-wave (pinheads) en passant par le punk garage. Au-delà du disque, on imagine le potentiel que le groupe doit développer sur scène.
A travers ces références assumées, en mettant ses pas dans ceux de leurs illustres prédécesseurs, Unik Ubik est l’aérosol qui prolonge la vie d’une certaine musique underground des années 80.

L’autre parallèle - celui-ci plus sous-jacent - avec l’univers de Philip K. Dick, c’est le rapport à la société de consommation. Chaque chapitre du livre Ubik s’ouvre sur une publicité pour ce produit miracle multi-fonctions. En résonance, le groupe Unik Ubik utilise les codes actuels du marketing musical. Les chansons sont en anglais, clippées, ont une durée « format radio », nulle trace d’improvisation, les musiciens se prêtent au jeu de la photo de groupe. S’agit-il d’une démarche ironique et distanciée ou d’une adhésion assumée ou inconsciente ? Peu importe, chacun y verra ce qu’il souhaite et cela n’enlève rien au charme certain de cet album qui s’écoute facilement à répétition avec une gourmandise même pas coupable.

par Hélène Gant // Publié le 17 avril 2022
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