Scènes

La Cigale et Label Bleu

Chronique du concert parisien du quintet « Fire and Forget » de Julien Lourau (5 avril 2005)


A l’occasion de la sortie de Fire and Forget, son dernier opus chez Label Bleu, Julien Lourau s’est produit avec son quintet à la Cigale, mardi cinq avril.

Mardi cinq avril à la Cigale, devant un public de jeunes, Julien Lourau a donné un concert de rock.
Il y avait bien une basse acoustique, un saxophone et deux musiciens de jazz. Mais pour le reste, c’était plutôt du rock ou un jazz gorgé d’électricité et d’effets : c’est pareil, non ?

Tout a commencé par quelques mots du leader qui nous a dévoilé ses intentions : faire feu et oublier.

(c) Patrick Audoux

Nous étions prévenus. Pas assez, cependant... Un uppercut, ça surprend toujours, surtout venant d’un teigneux, comme ce Lourau. Un hymne strident, joué à fond, une bagarre entre Daniel Garcia Bruno et ses toms (il a gagné), les clusters de Bojan Z sur un Rhodes distordu, Vincent Artaud, boule à zéro et grosses paluches, tirant sur les cordes de sa contrebasse et le ténor de Julien Lourau, saturé d’effets, crachant ses sons dans une forêt de micros. Eric Löhrer, le guitariste ? Il boudait. Il a boudé pendant tout le concert d’ailleurs...

L’incantation s’est vite transformée en quasi free. Et le free, ça peut tourner à la transe. Il s’en est fallu de peu. Seulement voilà : il n’y a pas eu de transe. Le morceau fut trop vite terminé, il n’est resté que la frustration, parce qu’il aurait pu se passer autre chose avec ces hommes, que la simple redite d’un disque, par laquelle le concert s’est poursuivi.

Mettons ça sur le compte d’une période de rodage, comme en attestent certains problèmes de balance : la basse et la guitare s’entendaient mal. Et puis, que de temps passé par Julien Lourau, Eric Löhrer et Bojan Z à régler des potentiomètres, caresser des touchpad ou basculer des interrupteurs !

John Greaves s’est introduit subrepticement sur la scène, en costard, le badge encore autour du cou, pour chanter ou plutôt déclamer. Il fut bientôt relayé par Allonymous, bien plus flashy avec sa chasuble, sa longue écharpe, son bibi et ses déhanchements de breaker. Lui aussi avait oublié de retirer son badge, ce qui prouve une fois encore que le diable se niche dans les détails...

Vers la fin, Julien Lourau s’est lancé au ténor dans un solo sans accompagnement. Le silence était total dans la salle. Ce type est né avec le groove. Il l’a prouvé une fois de plus dans cet exercice périlleux. Il joue du sax « avec l’accent américain ». C’est peut-être ce qui le distingue de ses jeunes collègues de la scène hexagonale, comme Christophe Monniot et Mathieu Donarier, qui peuvent paraître plus aventureux aux oreilles exigeantes.