Chronique

Pierre de Bethmann

Oui / Cubique

Pierre de Bethmann (Rhodes), Jeanne Added (voc), Stéphane Guillaume (as), David El Malek (ts), Michael Felberbaum (g), Vincent Artaud (b), Franck Agulhon (dms).

Label / Distribution : Aléa

Au bout du chemin, ou presque ! Pierre de Bethmann continue le travail de réédition de ses albums sur le label Aléa. Une maison qui accueille désormais les trois disques de son Medium Ensemble, ses quatre Essais en trio et qui a entamé depuis l’année dernière la mise au jour des productions d’Ilium. Tout récemment, c’étaient Ilium (2003) et Complexe (2005) ; voici maintenant Oui (2007) et Cubique (2009), dont la caractéristique commune est la formule en septet. Aux membres du quintet (David El Malek, Michael Felberbaum, Vincent Artaud et Franck Agulhon étant aux côtés du pianiste ici exclusivement au Fender Rhodes) étaient venues s’ajouter les voix de Stéphane Guillaume (saxophone alto) et de Jeanne Added (chant). Comme une préfiguration en réduction du Medium qui émergerait quelques années plus tard.

Si à l’époque de sa sortie, Mathieu Durand, déplorant quelques longueurs, aurait souhaité dans sa chronique de Oui que l’album fût un peu plus court – un avis que l’auteur de ces lignes, séduit avant tout par l’énergie communicative du septet, ne partage pas – il n’en soulignait pas moins le panache d’une formation marquée par un enthousiasme collectif et l’intensité des interventions en solo de son leader ou du toujours juste David El Malek. Autant de qualités donnant l’envie de voir Ilium sur scène, confirmées par un Cubique de très belle facture, ce que nous n’avions pas manqué de souligner ici même. Parce qu’on ne le dira sans doute jamais assez : toute cette musique est singulièrement humaine en ce qu’elle est très exactement celle qui habite Pierre de Bethmann au plus profond de son être. C’est son imaginaire un peu ébouriffé que vous y entendrez. Artiste sincère, musicien du mouvement, maître d’horloges auxquelles il aime imprimer un rythme variable, dans l’urgence comme dans la contemplation, pourvoyeur d’un groove auquel il est bien difficile de résister, compositeur savant et libre à la fois, chef d’équipe soucieux d’emmener ses partenaires au plaisir d’une réalisation de groupe. On a parlé parfois de jazz rock au sujet d’Ilium (peut-être parce que sa coloration est assez électrique), jusque dans ses configurations anglaises façon École de Canterbury (la présence de la voix de Jeanne Added, pas encore chanteuse de rock, et la fluidité du jeu de Michael Felberbaum, y contribuent pour beaucoup). Les années passant, on se rend compte que cet étiquetage est secondaire. C’est un repère, avant tout. Il ne doit surtout pas contrarier la jubilation qu’on ressent à l’écoute d’une musique sur laquelle les années passent avec bonheur.

Ne manque plus que la réédition de Go (2011) pour parachever ce travail qu’on saluera une fois de plus. Ce qui sera fait bientôt, avec la promesse d’un nouveau disque d’Ilium en quartet – dans la continuité de sa dernière formule – où devraient faire leur apparition Simon Tailleu à la contrebasse et Antoine Paganotti (batterie). On suivra tout cela de près, forcément.