Chronique

Little Red Suitcase & Lars Skinnebach

Enhver betydning er også en mislyd

Lars Skinnebach (voc, as, fl), Johanna Borchert (cla), Elena Setién (voc, vl, perc), August Wangrenn (mandoline, 4)

Label / Distribution : ILK Music

Derrière Enhver betydning er også en mislyd, titre qui paraîtra étrange à tous ceux qui ne sont guère accoutumés aux langues scandinaves, et que l’on pourrait traduire par « Chaque murmure a son importance », il y a la rencontre entre le duo germano-danois pétillant Little Red Suitcase et le poète-saxophoniste Lars Skinnebach pour un album où le verbe – danois - est au centre du propos.

Little Red Suitcase n’est pas inconnu en France. Les deux jeunes femmes étaient invitées au Grenoble Jazz Festival en avril 2010 et le public français a pu découvrir à cette occasion un univers enfantin et décalé, une musique espiègle entre pop aventureuse et jazz sucré (Temporarily Out of Order. L’Allemande Johanna Borchert au piano et la Danoise Elena Setièn au violon mêlent leur voix à l’univers plus pénétrant de Skinnebach, qui déclame ses poèmes en danois sur un fond délicat de piano préparé et de violon jouant de l’ensemble de ses ressources.

Certes, cette langue heurtée déroute en nos contrées, mais sans saisir le sens on se laisse porter par la rocaille danoise. L’univers enfantin de Little Red Suitcase est mis à mal, traversé par une ambivalence dissonante qui met en valeur le talent de Borchert au piano préparé ; c’est même l’excellente surprise de cet album, qui se clôt sur un solo inspiré. Lorsque Setièn chante sur « Hurtige Drømme » - encore un texte de Skinnebach -, on a une sensation un peu pernicieuse de jouet cassé, impression renforcée par les morceaux suivants, « 7.1 » et « 8.1 », quasi hurlés par le poète et engoncés dans un déluge de cordes. Le tout apporte une touche supplémentaire de malaise, un sentiment d’entre-deux que confirme l’enchaînement des morceaux.

La rencontre entre ces deux univers est fructueuse ; le jeu d’alto tout en ruptures de Skinnebach apporte l’épaisseur qui manquait à l’indolence mutine de Little Red Suitcase et donne du corps à une démarche jusque-là un peu sophistiquée, tout en révélant d’excellents musiciens.