Chronique

Mahieu-Vantomme Quartet

Whatever

Tom Mahieu (ts), Dominique Vantomme (p), Christophe Devisscher (b) ,Geert Roelofs (d)

Label / Distribution : De Werf

Depuis la sortie du coffret The Finest in Belgian Jazz en 2002, De Werf s’est recentré en publiant du jazz contemporain balançant entre swing et funk, accords et modes. Whatever, le deuxième album du Mahieu-Vantomme Quartet n’échappe pas à cette règle, mais est pour moi l’oeuvre la plus convaincante de cette petite série.

Le pianiste Dominique Vantomme compose six morceaux, qui semblent vouloir se regrouper par paires. « VCP (Very Crazy People) » et « M1 » développent des ambiances ouvertes, à la fois douces et quelques peu abstraites, jouées presque rubato et colorées délicatement par les cymbales de Geert Roelofs. Vantomme y est très à son aise, jouant surtout des lignes à la main droite afin de laisser un maximum d’espace à la section rythmique, qui fait bien plus qu’accompagner. Si sur « VCP » Tom Mahieu semble mal à l’aise, accentuant de manière lourde et stéréotypée les modulations, il brille sur « M1 » en jouant plus sur la diagonale et en introduisant quelques petites écabloussures free.

« Two Stores High » et « Flying High » sont plus rythmés. Le premier commence avec un thème où la superposition d’un riff de piano aux consonances arabes et l’extrapolation du saxophoniste sur ce même riff crée un bel effet rythmique. Puis le groupe montre sa capacité à gérer un swing rapide où plusieurs tempi sont latents, l’un ou l’autre pouvant surgir à tout moment, sans donner l’impression de forcer ou de perdre de leur naturel. Globalement, « Two Stores High » perd de sa cohérence avec la juxtaposition de ces deux parties qui n’ont rien à voir l’une avec l’autre, mais en isolation chacune à son intérêt.

Avec « Daddycated » et « Sharon », Vantomme écrit deux ballades qui s’imbriquent. La courte berceuse en piano solo « Daddycated » débouche sur la ballade « Sharon » pour huit minutes lentes, mélodiques et émotionnelles. Vu sa tendresse, je suppose que « Sharon » est le prénom d’une femme plutôt que le nom de famille d’Ariel !

« Relativity », la première des trois compositions de Mahieu, ouvre l’album en fanfare, avec une métrique composée et funky, très entraînante, qui joue sur les temps et les contre-temps de belle manière, sans oublier de se doter d’une mélodie accrocheuse. « After Emotions » commence avec le saxophoniste seul, avec un peu de vibrato, de souffle et de grain dans le son pour des émotions à fleur de peau, avant que Vantomme ne le rejoigne pour un duo un peu plus rythmé et traversé de blues. « What Are We Waitin’ For » clôt Whatever de manière assez décevante : une petite chanson sur un back-beat faisant penser à du sous-A Tribe Called Quest d’il y a une douzaine d’années. En revanche, juste avant, Mahieu brillait sur « Flying High », au swing rapide et intense, en faisaint progresser son solo non pas en augmentant le volume, mais en dosant son niveau d’interaction avec le groove : au début il flotte un peu nonchalamment au-dessus, puis il se laisse happer.

Christophe Devisscher fournit un travail impeccable tout au long de l’album : il est présent à l’appel des morceaux plus lents qui laissent paraître son jeu mélodique, et propulse les morceaux rapides sans relâche. La plus réussie de ses deux compositions est « Belly Buttons », où le bassiste maintient un ostinato rapide et percussif qui met particulièrement en valeur le côté agressif de Mahieu.