Chronique

Ping Machine

Easy Listening

Label / Distribution : Neuklang / Harmonia Mundi

Ping Machine est une formation maintenant bien en place dans le paysage jazz français. Menée par Frédéric Maurin, guitariste mais surtout leader de ce big band hors du commun, elle s’inscrit très clairement dans le registre des musiques improvisées et du jazz moderne. Sans surprise, les deux albums qui viennent de sortir simultanément sont faits de cette étoffe qui ne supporte ni le clinquant ni l’esbroufe. Deux albums donc, et deux esthétiques différentes dont celui-ci, intitulé Easy Listening, qui est d’approche effectivement plus facile. Mais, ainsi que le souligne Louis Victor dans Jazz News, malgré l’intitulé, on est « loin de l’esthétique jazz FM » et, si besoin était, on ajoutera qu’il s’agit d’un disque extrêmement beau.

« Kodama », qui ouvre l’album, est une transe de dix minutes, fulgurante mécanique sur laquelle surfe un solo de Julien Soro au saxophone ténor tandis que l’orchestre, crescendo, se met en branle jusqu’à prendre le dessus. C’est cette même transe qui traverse intégralement ce disque au gré des quatre pistes qui le composent. Car les morceaux - trois enregistrés en studio et un dernier en live au Petit Faucheux à Tours - sont longs. Et c’est tant mieux puisque ce choix permet à la narration musicale de se mettre tranquillement en place. La musique s’installe, sereine, s’étire dans un sens puis dans l’autre et dessine un imaginaire quelquefois psychédélique, toujours onirique. Les chorus sont tantôt plaintifs à l’instar de celui que Fabien Debellefontaine prend à la clarinette sur « Février », tantôt rêveurs comme celui de Bastien Ballaz au trombone sur ce même morceau. Mais de manière plus générale, tout est fait d’une multitude de touches pointillistes déposées ici et là pour composer l’ensemble. De fait, la fresque qui en ressort est souvent évoquée, création évanescente, avant d’apparaître soudain au gré de la juxtaposition de ces innombrables éléments tous ajustés comme autant de vilebrequins usinés à la main. C’est tout simplement remarquable.

par Gilles Gaujarengues // Publié le 26 juin 2016
P.-S. :

Bastien Ballaz (tb), Stéphan Caracci (marimba, vb), Andrew Crocker (tp, flugelhorn), Jean-Michel Couchet (as), Guillaume Christophel (clb, bs), Fabien Debellefontaine ((f, cl, as), Florent Dupuit ((f, f alto, piccolo, ts), Quentin Ghomari (tp, flugelhorn), Didier Havet ((tb bass, tuba), Paul Lay (p), Rafaël Koerner (d), Frédéric Maurin (g, g baritone, synthétiseurs, max 7, dir), Fabien Norbert (tp, flugelhorn), Raphaël Schwab (b), Julien Soro (cl, ts)