
Figure familière et incontournable du jazz et des musiques improvisées européennes, Ramón López a fait de la batterie le moyen le plus sûr d’aller à la rencontre de l’autre. Le nombre de collaborations, dans tous les contextes - principalement les plus aventureux - qui jalonnent sa riche discographie le prouve avec pertinence. Amoureux des musiques, celles qu’on écoute et celles qu’on joue, c’est pourtant à intervalles ponctuels mais réguliers qu’il ressent le besoin de se retrouver seul derrière son instrument pour un dialogue avec lui-même, quoique entouré de la présence de celles et ceux avec qui il a un jour entretenu un échange.
Voici donc un troisième disque (Eleven Drum Songs en 1998, Drums solo II, Swinging With Doors, en 2007 sont parus chez Leo Records) qui sort cette fois chez Rogue Art et permet d’entendre avec clarté l’entièreté du jeu de Lopez.
De son set de batterie d’abord. Complété par un tabla et un cajón, l’intégralité des éléments sont parfaitement distincts grâce à une prise de son soignée, mais également par un jeu qui évite la juxtaposition brouillonne et privilégie la clarté du propos. Le batteur joue effectivement avec beaucoup de justesse et de parcimonie. Caisse claire, charley, cymbales, toms constituent la palette de couleurs qu’il utilise pour construire un discours limpide qui s’écoule avec facilité.
Ainsi ne s’agit-il pas de faire de cette pratique solitaire un vulgaire exercice pulsatile mais bien de jouer avec le temps. Par un toucher qui utilise les degrés de l’intensité, du piano au forte, un jeu sur les contrastes de timbres, les associations inattendues, on se retrouve dans une dimension physique et sensuelle qui flatte l’oreille et l’emporte dans une histoire. Sans se charger du poids de l’harmonie, même si tout cela chante, l’auditeur est emporté dans une suite d’effets, de perspectives et de vitesse qui agissent sur la surface sensible de ses oreilles comme autant de points d’acupuncture et canalisent les énergies qui le traversent.
Pour tout dire, le titre 40 Springs in Paris qui marque le temps passé en France par Ramón López ne peut que nous réjouir : après les printemps viendront les étés.