Chronique

Silvan Strauss

Flukin’

Label / Distribution : Kabul Fire Records

Le télescopage entre une multiplicité de genres musicaux fait de Flukin’ un album énigmatique. Les coloris kaléidoscopiques imaginés par le batteur Silvan Strauss ne peuvent laisser indifférent. Tous tournés vers des lendemains où l’immatériel se conjugue avec l’épanouissement de l’espèce humaine, dix morceaux s’imbriquent ingénieusement.

Laissez-vous prendre par la main. Silvan Strauss vous embarque dans un monde propice aux recherches sonores travaillées avec acuité et captées en studio. « Sky » introduit les sons électroniques d’Alex Eckert et du mellotron de Joe Armon-Jones, membre d’Ezra Collective et passé maître pour ses recherches élaborées dans les univers de la pop et du dub. « Chulas », animé par la flûte orientale d’Anna-Lena Schnabel, mêle la flexibilité du jeu de batterie de Silvan Strauss à la science musicale de Farhot, fondateur de Kabul Fire Records et producteur de Selah Sue et Isaiah Rashad.

Des leitmotivs ensorcelants s’inscrivent dans une diversité d’expressions rythmiques. Nombreuses sont les mélodies répétitives qui se fondent dans les formes originelles du hip-hop. « Jörgi, My Dear » énonce des fluctuations initiées par un piano électrique tout autant qu’éclectique et « Sudan », bercé par la voix profonde de Mehdi Qamoum, laisse transparaître les parfums enivrants du sud. La tentation de privilégier uniquement les effets électroniques est contredite par l’apparition de la clarinette d’Adrian Hanack dans « Free », ce qui installe un paradoxe temporel où les origines du jazz rencontrent les séquenceurs.
Flukin’ favorise une collaboration fructueuse entre différents artistes, des traditions musicales ancestrales transparaissent dans les courtes compositions qui visent toutes l’efficacité. Passé par des formations diversifiées telles que Fünf Sterne Deluxe, Flo Mega ou le NDR Big Band, Silvan Strauss a réussi à fusionner des mécanismes narratifs hétérogènes.

par Mario Borroni // Publié le 15 juin 2025
P.-S. :

Joe Armon-Jones (mellotron), Alex Eckert (g, electronics), Farhot (b, d programming), Anna-Lena Schnabel (fl, sax), Bertram Burkert (g, b, keys, voc), Salomea (voc), Oscar #Worldpeace (voc), Giorgi Kiknadze (b, keys, programming), Yanis Anft (p, mellotron, juno 60, wurlitzer), Alex Eckert (strings), Daniel Stritzke (b), Mehdi Qamoum (guembri, voc), Adrian Hanack (cl), Silvan Strauss (d, perc, keys)