Chronique

Simon Goubert

Background

Label / Distribution : Le Chant du Monde

Hier, maintenant, demain… [1]

Autant l’avouer ici, je ne suis pas un grand lecteur de ces textes laudateurs souvent anonymes ou des déclarations d’attention et d’intention de musiciens qui accompagnent les envois de disques (identiques aux quatrièmes de couverture des livres) ; mais il peut y avoir exception, surtout pour un artiste qu’on aime et apprécie. C’est le cas pour moi avec Simon Goubert […] et la complétude de son travail de compositeur, arrangeur, leader, interprète. D’abord une question que pose le musicien : « Quoi de plus fondateur, de plus utile et parfois de plus encombrant que ce que l’on a coutume d’appeler le background, c’est-à-dire l’expérience acquise durant notre vie passée ?… » Puis une affirmation : « Cet album est donc à la fois un regard vers mon passé mais c’est surtout un constat : mon background m’a aidé à regarder autour de moi et à comprendre l’importance de ceux avec qui je fais la route… aujourd’hui et maintenant ». Saluons la lucidité, la probité, la modestie de l’artiste ; ce n’est pas courant dans un monde où l’égocentrisme prolifère et dans lequel les déclarations essaient trop souvent de valider le projet artistique.

La musique de Goubert, c’est d’abord la fidélité ; on retrouve en effet les musiciens du quartet qu’il dirige depuis l’an 2000 auquel s’ajoutent deux récentes révélations, le saxophoniste alto Pierrick Pedron et le guitariste Manu Codjia. Le batteur, également claviériste, peut donc s’appuyer sur un socle solide pour présenter cette musique d’aujourd’hui, d’une évidente majesté, qui doit beaucoup au passé amis se projette aussi vers le futur. Il y a tant de musiciens qui, (je me répète mais j’assume), préfèrent se servir du jazz plutôt que le servir, qu’il faut ici saluer la démarche d’authenticité d’un créateur incontestable.



Sans que cela soit uniforme, univoque, l’exigence (une certaine oblativité envers la musique, également) du musicien se manifeste tout au long de ses compositions et des interventions. Si l’on connaît bien les membres de cet octet au travers d’autres formations, j’attire l’attention sur Boris Blanchet, trop discret à mon goût, qui mérite plus qu’un succès d’estime (son solo impétueux dans « Background »). A signaler l’hommage que Goubert rend à son ami Elton Dean (« Mister Dean »), saxophoniste britannique (l’un des fondateurs de Soft Machine) aujourd’hui disparu, avec qui il avait formé le groupe Soft Bounds ; à noter aussi une version à la fois respectueuse et débridée du monkissime « Hackensack » en trio avec un survolté et le fidèle et précis Michel Zenino.

Parmi les batteurs trop souvent éclipsés par leurs confrères étrangers, Simon Goubert au si beau son représente à mes oreilles (avec Louis Moutin, Christophe Marguet, François Merville, Franck Agulhon et bien entendu André Ceccarelli, qui fait figure de vétéran), ce qui se joue de mieux dans le domaine de la percussion contemporaine. Cet opus remarquable, que je vous invite à découvrir, fera partie de ma sélection des meilleurs disques écoutés en 2008.

Pierrick Pedron (saxophones alto & soprano), Boris Blanchet (saxophone ténor), Emmanuel Codjia (guitare), Sophia Domancich (piano), Michel Zenino (contrebasse), Simon Goubert (compositions sauf 5 & 6, batterie, piano, claviers)

  • 1/ Organum IV
  • 2/ For yesterday
  • 3/ Mister Dean
  • 4/ C’est là, quelquefois
  • 5/ Hackensack (Th.Monk)
  • 6/ Souvenirs d’Almati (M.Zenino & S.Goubert)
  • 7/ Quelqu’un… et eux
  • 8/ Background


  • 6 février : Sophia Domancich Simon Goubert Duo - Rochefort (17) - Théâtre de la Coupe d’Or
  • 7 mars : Simon Goubert Quartet - Festival Focus Jazz de Vire (14) - La Halle
  • 4 avril : Sophia Domancich Simon Goubert Duo - Tours (37) - Le Petit Faucheux 24
  • 25 avril : Simon Goubert Sextet « Background » - Paris - Sunside
  • 29 avril : Sophia Domancich Simon Goubert Duo - Festival Europa Jazz du Mans (72) - Abbaye de l’Epau
par Jacques Chesnel // Publié le 2 février 2009
P.-S. :

Cet article a initialement paru sur Sitartmag. Vous pouvez retrouvez Simon Goubert sur son site.

[1Allusion au disque de S. Goubert intitulé Et après…