Chronique

Stéphane Mercier Quartet

Walking The Soul Map

Stéphane Mercier (as, fl), Charles Loos (p), Bas Cooijmans (b), Marek Patrman (dms)

Label / Distribution : Mogno

Sur l’album comme en concert, la jolie sonorité (à la fois brillante et sablée) de Stéphane Mercier tout comme son phrasé vif et inspiré, participent largement de la réussite, de l’immédiateté jouissive du Mo’ Avast Band de Mauro Gargano, dont nous avons pensé le plus grand bien. Il était temps d’aller plus avant dans la découverte d’un saxophoniste qui souffre en France d’un manque de visibilité dû au grand mur invisible qui semble se dresser entre nous et nos voisins belges. Dommage, car le musicien est aussi talentueux que l’homme est attachant. Et c’est probablement parce qu’il joue comme il parle, honnêtement et en restant attentif à l’autre, que sa route a croisé celle de musiciens aussi prestigieux que Chris Cheek, Mark Turner, Miguel Zenon, Seamus Blake ou Jeff Ballard.

Sur le label Mognomusic paraît Walking the Soul Map, son quatrième album en tant que leader, tout au long duquel ses qualités d’instrumentiste servent des compositions et des reprises traitées avec élégance. Cet amoureux de la mélodie ne cherche pas à la perdre de vue, à la déguiser, la contourner ou la repenser. Il la joue, concentré sur le son, et son saxophone (un magnifique Conn de 1940) n’a de cesse de chanter, comme le firent avant lui ceux de Sonny Stitt ou de Julian Cannonball Adderley.

Son phrasé limpide, résolument bop, chemine avec légèreté entre les accords consonants et moelleux de Charles Loos, accompagnateur prévenant, soliste délicat au jeu d’une grande musicalité. On ne joue pas par hasard avec Chet Baker, Art Farmer ou Johnny Griffin, et ce pianiste montre ici combien sa maîtrise sereine et sa générosité peuvent être précieuses.

Complété par le solide tandem rythmique Bas Cooijmans(contrebasse) et Marek Patrman (batterie), le quartet développe un jeu collectif au sein duquel les rôles sont traditionnellement répartis mais où chacun dispose d’un périmètre de liberté rendu confortable par l’aspect « cool » et aéré des thèmes et des arrangements. D’où, pour l’auditeur, le plaisir d’écouter une musique simple et chaleureuse qui vit à travers de belles intentions musicales, des lignes mouvantes nées d’un souci évident de l’interaction. Car le groupe carbure à l’empathie et l’on ressent bien le plaisir que les quatre musiciens ont pris à jouer ensemble, à donner autant d’importance au son collectif et au soutien mutuel qu’à la qualité de leurs interventions personnelles.

Sans forcer le trait, les morceaux ont tous un petit quelque chose qui incite à y revenir. Les notes bleues du saxophoniste sur « Back To The Land », la ligne de contrebasse élastique et en perpétuelle réinvention de « Ma Elle », délicatement groovy, le lyrisme de Charles Loos sur « La chapelle », la sensibilité de « Fragile », le doux optimisme de « Matis », l’entêtant motif de flûte de « Djorolen » ou le dynamisme de « Straighten Up And Fly Right » (en version trio) de Nat King Cole contribuent, entre autres beaux moments, à faire de ce Walking The Soul Map un disque plein de charme que vous pourrez vous procurer en quelques clics sur le site du label.