
Après un Conspiracy remarqué par la densité et le classicisme bien compris de l’orchestre, le saxophoniste et donc chef d’orchestre autrichien Tobias Hoffmann revient avec un Innuendo qui se veut plus ambitieux dans sa forme et dans son écriture. Le Jazz Orchestra de Hoffmann (THJO) a changé dans la continuité, s’appuyant sur une très élégante base rythmique où le batteur Reinhold Schmölzer est aussi discret qu’efficace. « Innuendo », qui donne son titre à l’album, est l’occasion d’entendre le batteur construire une base rythmique avec le Finlandais Vilkka Wahl, qui était déjà de la première aventure. Parmi les nouveautés, outre un recyclage quasi complet du pupitre des trompettes et un nouvel équilibre reposant sur la ligne des trombones, les recettes de Tobias Hoffmann sont restées les mêmes.
Le chef est très porté sur la pop sans que la facilité et le clinquant ne dominent, tel ce « Summer Soltice » qui assume parfaitement son influence nordique omniprésente. Le morceau, très écrit, se construit autour du tromboniste Simon Harrer, au jeu très précis, là aussi sans effets inutiles. La manière de procéder de Hoffmann est très narrative, sans chercher à briller. L’orchestre, rien que l’orchestre, même dans ce « Innuendo » aux pistes multiples et presque naturellement inspiré de l’œuvre de Queen. C’est ce morceau qui lui a valu, récemment, un prestigieux Downbeat Award, entre autres prix. Ce talent d’écriture est omniprésent, comme dans « The Lake » où l’aspect très coloriste et impressionniste perdure : la brume est tombée sur le soleil, et l’on retrouve le beau travail du batteur Jakob Helling, déjà très en vue dans le précédent album.
Le minimalisme cher au cœur d’Hoffmann s’offre quelques libertés vers une musique plus pavoisée (« Perseverance »), mais l’Autrichien ne se résout pas à jouer l’outrecuidance, même si le THJO est capable de tout renverser sur son passage. « Bipolarity » en est le parfait exemple, avec encore un beau solo de trombone de Robert Bachner. Innuendo est un bel essai transformé, qui nous permettra par ailleurs de noter précieusement le nom de la pianiste autrichienne Viola Hammer.