Chronique

Cholet - Mascart - Cholet

Miss Kiss

Jean-Christophe Cholet (p), Vincent Mascart (ts), Quentin Cholet (dms)

Label / Distribution : Infigo

Ce qui lie le saxophoniste Vincent Mascart à Jean-Christophe Cholet est ancien : sa participation à Diagonal, ainsi que celle de Cholet à Circum, un disque du saxophoniste qu’il est bon de réécouter à l’occasion, en témoignent. Les retrouver ensemble dans un trio sans basse, le piano très rythmicien à la main gauche leste faisant l’affaire, n’a rien d’étonnant. Ajoutez à ceci la présence d’un jeune batteur prometteur, Quentin Cholet, et deux réflexions affleurent : d’abord, que bon sang ne saurait mentir, dit-on, mais surtout que Miss Kiss est un disque de l’intime, au-delà même du compérage. J’en veux pour preuve cette jolie ballade qu’est « Aubade ». Le piano et la batterie, en symbiose, tressent un maillage très dru sur lequel Mascart joue tout en velouté ; dans le jeu de Cholet, il y a des nuances de Ravel, des fragrances de Poulenc, et surtout une douceur intrinsèque. Les morceaux ont beau être largement improvisés, comme l’errance et le flux grossissant de « Styx » le suggèrent, il y a une imprégnation qui porte la marque de Diagonal dans cet équilibre constant entre ascétisme et complexité.

« Marmaille », sans doute l’un des plus beau morceaux de l’album, est une sorte de précipité de ce qui unit le triangle. Le propos avance d’abord à pas feutrés. Le saxophone chancelle avant d’être guidé par la famille Cholet qui apparaît comme un double solaire : le piano joue un hymne à la nuit quand la batterie se réserve l’incandescence. Le jeu de Quentin Cholet est nerveux sans être tonitruant, il y a une énergie motrice qui le met à la pointe du triangle. Une impression qui débute dès « Diane » où c’est lui qui dynamise l’échange, entre un saxophone véloce et un piano qui fouille dans ses entrailles pour mieux chercher l’instant parfait.

En grand amateur de trio (on se souvient de son alliance fameuse avec Känzig et Papaux), Jean-Christophe Cholet choisit une formule très égalitaire pour Miss Kiss ; parce que les morceaux sont improvisés bien sûr, mais même sur le très soyeux « All Alone » de Mal Waldron, qu’il ouvre avec un jeu aussi léger qu’une fine pluie d’hiver, chacun trouve sa place, cajolant la mélodie couvée par Mascart dans des effleurements de cymbales. Un moment de quiétude qui se place au centre d’un très bel album.