Chronique

Tobias Hoffmann Orchestra

Conspiracy

Label / Distribution : Mons Records

Déjà repéré il y a quelques mois pour son nonet, le saxophoniste allemand Tobias Hoffmann, installé à Vienne, troque avec bonheur les anches pour la baguette. Dans une démarche très influencée par ses connexions avec le NDR BigBand de Hambourg qui l’avait convié à l’été 2021, Hoffmann présente avec Conspiracy un album enregistré avec dix-huit pupitres qui revendique une approche très classique de l’orchestre, sans clinquant ni effets de manche. Avec « Trailblazers » et sa forme de blues, l’orchestre peut montrer sa belle rythmique (Reinhold Schmölzer à la batterie, qu’on avait pu entendre dans le David Helbock Trio) et offrir au tromboniste Kasperi Sarikoski un formidable solo.

La présence du musicien finlandais affirme la posture très européenne de Hoffmann. Multiprimé dans le monde entier (il a obtenu un prix à New York pour ses compositions, décerné par Randy Brecker), il a surtout séduit de nombreux professionnels, de la Belgique à la République Tchèque en passant par la Finlande. Tenant d’une approche très fluide de l’orchestre, où la simplicité ne s’oppose pas à la virtuosité, comme on l’entend dans le doux « Awakening » qui laisse la place au dialogue collectif entre les soufflants. Lorsque le bugliste Jakob Helling discute doucement avec le piano de Phillip Nykrin, un pilier de l’orchestre de Christian Muthspiel, c’est davantage pour offrir une nouvelle perspective et pour éclairer différemment une dynamique d’orchestre marquée par la figure de Gil Evans.

Il n’y a pas de nostalgie dans cette musique, qui regarde dans le rétroviseur non par mélancolie mais afin de rendre grâce à ceux qui ont construit l’oreille de Tobias Hoffmann. Le chef d’orchestre ne s’embarrasse pas de clinquant. Ce n’est pas parce qu’avec « Conspiracy » il sait exactement faire briller les saxophones que les dorures dominent : fasciné par la texture du son, et la capacité pour un orchestre de donner la densité et du relief, Hoffmann sait utiliser son ensemble au maximum de ses capacités, avec un travail à la fois élégant et recherché. Invité par le prestigieux Big Band slovène RTV, c’est là-bas qu’il a travaillé ces compositions très matures qui renouent avec une harmonie sobre, sans faux-semblants ni étalage.

par Franpi Barriaux // Publié le 20 août 2023
P.-S. :

Tobias Hoffmann (comp, dir), Patrick Dunst (as, ss, fl), Andy Schofield (as, fl, cl), Robert Unterköfler (ts, ss, cl), Martin Harms (ts, cl), Jonas Brinckmann (bs, bcl), Dominic Pessl, Bernhard Nolf, Felix Meyer, Simon Plötzeneder, Jakob Helling (tp, flh), Kasperi Sarikoski, Daniel Holzleitner(tb), Robert Bachner (tb, eup), Johannes Oppel (btb, tu), Vilkka Wahl (g), Philipp Nykrin (cla), Ivar Roban Krizic (b), Reinhold Schmölzer (dms, elec)