Chronique

Amalgam - Olivier Renne Quintet

Osiris

Olivier Renne (d, perc, sifflet), Yannick Rieu (ts), Laurent Fickelson (p), Clovis Nicolas (b), Stéphane Belmondo (tp), Jean-Paul Adam (as).

Label / Distribution : Shaï / Sony

Deuxième enregistrement d’Oliver Renne, ce disque, placé sous le signe de la mythologie égyptienne, n’évoque pas véritablement les rivages du Nil. Mais la divinité choisie, Osiris, tuée puis ramenée à la vie par Isis en recousant les morceaux de son corps renvoie à la réincarnation. Et vu sous cet angle le disque se comprend mieux, car si un dieu est ici ressuscité, c’est John Coltrane. Chaque musicien s’emparant d’un morceau de son âme, le quintette est donc une sorte de réincarnation vivante de cette figure mythique du jazz.

Dès le premier titre « Contemplation » (déjà utilisé par McCoy Tyner) on sent la patte coltranienne. Un lyrisme brûlant associé à une rythmique toute en rondeur. Tous les titres ont beau être signés par Renne, on sent là une douce schizophrénie musicale où le spectre de Coltrane flotte au-dessus des notes. L’énergie monte, redescend, guidée par Olivier Renne qui impulse (!) la direction. Les cuivres se lâchent, Fickelson n’hésite pas à jouer très haut sur son clavier à la recherche de motifs délicats. La musique est habitée, tournée vers une force intérieure apaisante, en quête d’une illumination. La chaleureuse rondeur et la souplesse moelleuse du jeu de Yannick Rieu nous enveloppent telle une couette qu’on ne veut plus quitter. Belmondo est parfait sur les trois plages où il joue, se mêlant aux autres cuivres avec un plaisir évident.

Et si personne ne cherche à imiter (Fickelson ne sonne pas comme Tyner, Rieu comme Coltrane, Renne comme Elvin Jones, ou Nicolas comme Garrison), on ne peut s’empêcher d’entendre ici une descendance française du quartette de légende, chaperonné par le grand John, assis là, dans un coin du studio, les regardant en battant du pied la mesure.

Et l’on ne peut qu’apprécier nous aussi la résurgence de cette musique qui touche l’âme, démarquée des recherches avant-gardistes actuelles pour entretenir une flamme un peu trop vite soufflée par la vie. L’esprit de Coltrane est là. Et pour ceux que cela chagrine, la dernière piste « The night has a thousand eyes » est un hommage méconnaissable au standard immortalisé par Sonny Rollins. Peut-être l’annonce d’un prochain disque placé sous le signe de cette autre légende ? On en redemande.