Chronique

Gábor Bolla Quartet

On The Move

Gábor Bolla (ts), Robert Lakatos (p), Daniel Frank (b), Billy Drummond (dms)

Label / Distribution : Stunt Records

Mystère des opportunités offertes par la grande Europe du jazz, c’est à Copenhague et pour le label Stunt Records que les deux musiciens hongrois Gábor Bolla et Robert Lakatos se sont retrouvés pour enregistrer avec un américain et un suédois. Ces derniers sont le batteur Billy Drummond, un habitué de Chris Potter aperçu avec Lee Konitz ou plus récemment avec Sébastien Paindestre, et le représentant scandinave, le contrebassiste Daniel Frank, qui s’appuie sur la solidité de son compagnon rythmique pour tenir une boutique efficace et sans surprise. Le batteur est à son avantage dans « Love is Love », composition de Bolla qui s’avère être un excellent représentant de cette veine de jazz assez classique qui traverse la Hongrie de manière régulière.

Le son, l’esthétique et même la pochette de On The Move s’inscrit dans une couleur néo-bop où Robert Lakatos est dans son élément. Le fils de Béla Szakcsi Lakatos, qu’on avait pu entendre dans le très beau 8 trios for 4 pianists de la Szakcsi Génération, que son père enregistra en 2003 avec John Patitucci et Jack DeJohnette est à son avantage avec Bolla. Sur « Chelsea Bridge », titre de Billy Strayhorn, le piano se fait discret, mais apporte de subtiles ornementations autour d’une contrebasse au son profond, pleine de quiétude. Plus loin, sur « Swingin’ at The Haven » d’Ellis Marsalis, il rejoint la base rythmique pour donner de la profondeur à un Drummond qui joue en son jardin ; un parc statuaire où pas loin de Monk (« We See ») se dresse Sonny Rollins, référence absolue -et revendiquée- de Bolla.

Jeune prodige de la scène hongroise, Bolla a un son plein et puissant au ténor, qu’il consacre sans fioritures à la mélodie. Il écrit d’ailleurs des ballades qui, si elles sacrifient au péché de joliesse s’avère assez efficace, à l’image de « Blues on The move » qui offre l’occasion de faire briller un Lakatos impeccable. Bien qu’il y ai plus de quinze ans d’écart entre le saxophoniste et son compatriote pianiste, On The Move est articulé autour de la connexion, voire de la complicité sans heurts qui unit les magyars. Le disque célèbre également une longue histoire d’accueil des musiciens de jazz à Copenhague, qui s’en trouve ici perpétué.