Chronique

Gregory Porter

Take Me To The Alley

Gregory Porter (voc), Chip Crawford (p), Aaron James (b), Emanuel Harrold (dms), + invités

Label / Distribution : Blue Note

« Une belle découverte que ce premier album, celui d’un artiste prometteur et inspiré ». C’est ainsi que je concluais la chronique du premier disque de Gregory Porter, Water, en 2011.

Une voix étonnante, un chanteur jazz qui se renouvelle en permanence, artiste cross over par excellence, il sait passer du jazz académique à la soul music sans faillir, à l’inverse de ses auditeurs qui, eux, défaillent parfois d’émotion, touchés par le velours de sa voix de crooner. L’effet Sinatra.

Super star des festivals, meilleur vendeur de disque, collectionneurs de trophées, client absolu des médias avec sa chapka mystérieuse vissée sur la tête, le géant californien reste les pieds sur terre.
Take Me To The Alley est une nouvelle fois la preuve de son sens de la mélodie, du texte, du rythme qui fait de ses chansons des écrins cousus pour sa voix. On l’a entendu dans des registres nerveux et rythmiques, mais Porter semble se délecter de morceaux lents, de ballades, de soul whisperings à la Marvin Gaye.
Comment un tel musicien qui maîtrise parfaitement les sources chaudes (blues, gospel…), dont les paroles sont pleines de sens (car il ne s’agit pas seulement de bluettes schématiques : I love you / You love me, mais de textes ancrés dans leur temps, en phase avec la marche sociale et politique du monde) et qui sait s’entourer des musiciens qui le mettent en valeur (notamment le pianiste Chip Cawford qui lui fait la courte échelle sur tous les morceaux) pourrait-il décevoir ?
Cela semble difficile car Gregory Porter n’est pas un effet de mode, c’est un grand musicien. Et son succès n’est pas fabriqué par les marchands, à ce stade de sa carrière, ceux dont le succès l’avait été ont glissé dans l’oubli depuis longtemps. Ne boudons pas ce plaisir, il est le meilleur ambassadeur du jazz actuellement.
La preuve en musique.