Tribune

Jean-Jacques Sempé (1932-2022)

Hommage au dessinateur mélomane mort cet été 2022


Hommage à Sempé - Dessin (c) Cécile Mirande-Broucas

Jean-Jacques Sempé rêvait d’être pianiste : effleurer le clavier noir et blanc était sa récréation. Pourtant, ce sont bien les couleurs irisées de ses dessins qui donnaient aux villes surpeuplées la délicatesse d’une pluie d’été. Joueur, le co-auteur du Petit Nicolas a toujours misé sur l’enfance et la naïveté. Lui dont le trait a toujours eu l’air d’effleurer le papier, dont les personnages défiaient la pesanteur, dont les crayonnages tenaient arbres et chats pour seigneurs, nous a quittés.

Le monde du dessin a perdu un maître enchanteur qui aimait follement les musiciens, et le jazz particulièrement. Chez tout instrumentiste et dans chaque orchestre, Sempé voyait et soulignait l’humour. Il croquait l’universel dans la tâche quotidienne, glorifiait les souvenirs pour les faire swinguer et troquait l’aigreur pour la mélancolie. Chez Debussy, il glanait le charme de ce qui échappe à la précipitation, ce qui est en suspension. Grace à Count Basie, il oubliait la bêtise humaine et la lourdeur, pour servir la légèreté. Apprenant la mort de Duke Ellington, il a avoué avoir été inconsolable et pleuré chaque jour pendant un mois.

Alors, comme une réponse à ce lever de rideau célèbre ornant la première de couverture de son recueil « Musiques », nous lui adressons un collégial Salut teinté de la couleur de la note qu’il adorait. Hasta siempre, Sempé.