Chronique

Larry Ochs Sax and Drumming Core

Wild Red Yellow

Larry Ochs (ts, sopranino), Natsuki Tamura (tp), Satoko Fujii (p, synthétiseur), Scott Amendola (dm), Matthias Bossi (thunder drum, Chinese gongs, shaky flotsam, percussion), William Winant (timpani, roto-toms, percussion)

Label / Distribution : Rogue Art

Cofondateur du Rova Saxophone Quartet à la fin des années 70 et patron, avec le guitariste Henry Kaiser, du label Metalanguage Records misant sur la valorisation des musiques tangentielles, le saxophoniste californien Larry Ochs, à près de 70 ans, continue d’investir les territoires free qui sont les siens. Rien d’inattendu donc dans ce Wild Red Yellow, mais le plaisir de retrouver une sonorité généreuse et lumineuse.

Entouré d’une formation dont le nom est en soi un programme, le sextet joue une partition écrite mais ouverte dans laquelle l’invention de l’instant permet la circulation d’énergie. Traversant un grande variété de points stratégiques, la formation s’engage dans l’ajustement permanent d’une matière sonore abondante qui change de textures ou bifurque vers des climats nouveaux auxquels les synthétiseurs bouillonnants de Satoko Fujii donnent plus de volume encore.

Au piano, cette dernière martèle un enchevêtrement de notes sans interruption ou, au contraire, pilonne d’improbables accords. Ceinturant ou rehaussant ces excès, la trompette de Natsuki Tamura (son collègue au sein de la formation franco-nippone Kaze) joue des stridences avec un sens de la retenue qui en accentue le poids.

Soucieux toutefois de ne pas verser dans le tapage excessif qui est la facilité de cette musique, la formation réserve des étapes de repli au sein desquelles les individualités viennent prendre la parole. Témoins les dialogues aux phrases brèves mais essentielles du saxophoniste avec la batterie de Scott Amendola, ou les percussions de Matthias Bossi et William Winant qui colorent l’espace de nuances étranges. Elles engagent le groupe avec beaucoup d’intensité vers une poésie du son qui évoque des animaux ultramarins ou le roulement des graviers au fond de l’océan. Cuivre ou anches peuvent alors se positionner comme récitants et dérouler des contes merveilleux et inquiétants.