Scènes

Les Rendez-Vous de l’Erdre, journée dominicale


Christophe Marguet, photo Michel Laborde

Trente-cinquième numéro du festival les Rendez-Vous de l’Erdre à Nantes, l’édition s’étend sur une semaine du 23 au 29 août et donne l’occasion d’apprécier une programmation variée. Le dimanche, trois concerts de jazz français investissent la scène sous le ciel de la Loire-Atlantique.

Edward Perraud Trio
Fin de matinée, onze heures, une heure assez propice pour écouter la formation menée par le batteur Edward Perraud venu jouer son dernier disque en leader. Hors du Temps propose un répertoire en trio que complètent le piano délicat de Bruno Angelini et la contrebasse fondamentale d’Arnault Cuisinier. On est loin des embardées spectaculaires qui peuvent nous enthousiasmer chez ce batteur hors norme : le paysage est beaucoup plus nuancé.

La proposition musicale nous plonge dans une intériorité délicate quoique fort polie. Tout est demi-teinte, rondeur et bien-être. Le disque nous avait laissé ni hors, ni dedans mais à côté (tout est question de point de vue, notre collègue a un avis diamétralement opposé) ; la chaleur du live nous accroche mieux. Le trio joue la carte de l’unité avec un équilibre heureux entre les voix et sans faute de goût. D’une honnêteté sans faille, les musiciens oscillent entre tendresse et élégance sur des ambiances pop. Pourquoi pas.

Edward Perraud, photo Christophe Charpenel

Jean-Marc Foltz Quartet
18 h 30, fin d’après midi. Le clarinettiste Jean-Marc Foltz investit la scène avec un groupe choc puisque Christophe Marguet est à la batterie, Sébastien Boisseau à la contrebasse et Philippe Mouratoglou à la guitare acoustique. Deux disques ont déjà scellé leur rencontre, Viracocha et Wild Beasts qui est le programme interprété ce soir.

Autour de compositions savoureuses dédiées à des animaux sauvages, on entend une musique puissante, complexe, qui nécessite une mise en place au cordeau pour sonner pleinement. L’expérience des musiciens lui rend justice ; le manque de concerts réguliers ne permet pas toutefois un enlevé qui entraînerait le quartet vers un ailleurs brûlant qu’il est capable d’investir. Regret qui n’est en rien rédhibitoire. Le son est solide, tout en profondeur et, que ce soit l’assise lumineuse de la batterie ou les pleins chants de la clarinette ou de la basse, complétés par une guitare percussive, on sait où on se trouve. Dans l’exercice d’un jazz français classieux qui affirme, tête haute, son identité.

Christophe Marguet & Daniel Erdmann Quartet Pronto !
Le concert de la journée ! Le quartet est à l’initiative de Marguet (qui enchaîne là son second concert) et du saxophoniste Daniel Erdmann. Hélène Labarrière tient la basse ; Rita Marcotulli, de la partie au départ et finalement empêchée, devait en faire un groupe paritaire. Bruno Angelini est au piano ; avec plusieurs séances en commun, il est parfaitement à son aise. Les compositions sont signées des leaders.

Les familiers de ces deux univers y retrouvent le sens de la mélodie imparable qui les anime de même que ce prolongement si savoureux du jazz des origines passé par le filtre d’une culture européenne. Sur scène, le quartet est dynamique. La rythmique est massive, Labarrière notamment constitue un pilier robuste qui ne laisse personne en repos. Toujours aussi éclatante, la batterie offre un tapis bondissant aux engagements des solistes. A ce jeu-là, Erdmann et Angelini rivalisent. Leurs solos sont des aventures, une plongée dans des improvisations échevelées qui swinguent volubilement avec un féroce appétit. Les thèmes, porteurs et immédiats, viennent conclure les improvisations et déclencher les applaudissements du public. En prime, une intervention soliste de Marguet conclue d’un magistral coup de cymbale sur la fin du set marquera le concert dans les mémoires de qui y était. L’enregistrement devait avoir lieu trois semaines plus tard. On espère le disque aussi réussi.

Daniel Erdmann, photo Michel Laborde