Chronique

Marc Buronfosse Sounds Quartet

Face the Music

Marc Buronfosse (cb), Jean-Charles Richard (bs, ss, Shehnai, Bansurî), Benjamin Moussay (kb), Antoine Banville (dm)

Ce que l’on perçoit immédiatement à l’écoute de Face the Music du Sounds Quartet dirigé par le contrebassiste Marc Buronfosse, c’est la complicité tannée par les collaborations et les affinités musicales de ces quatre partenaires. On connaissait Marc Buronfosse en sideman fidèle de Stéphane Guillaume ou de Bojan Z, et on avait remarqué sa musicalité dans le fabuleux Horizon Quintet de G. Kornazov. C’est avec jubilation qu’on le découvre aujourd’hui en leader inspiré sur ce premier album [1] qui laisse entrevoir un univers intimiste et profond, et une forte personnalité. Sa formation initiale d’ingénieur du son éclaire la composante « Sounds » du nom de son groupe. En découle une attention toute particulière portée à la profondeur du son (grâce à la qualité de l’enregistrement de Sylvain Thévenard). Par ailleurs, en se combinant à la musicalité d’Antoine Banville, son jeu clair et coloré crée un syncrétisme qui sculpte la masse sonore à force d’entremêlements subtils bois et métal (l’excellent « Mirrors », qui ouvre l’album). C’est dans cette architecture saillante que vient s’épanouir le clavier diaboliquement rythmique de Benjamin Moussay qui sait émailler son discours de digressions sensibles (« A.O.C »).

Les quatre musiciens portent collectivement une musique robuste et constamment en mouvement où l’on distingue le constant à-propos du saxophoniste Jean-Charles Richard qui, par son jeu ample, apporte à la fois une épaisseur et d’infimes interstices, comme autant de brisures, par son travail sur les sonorités (notamment des raffinements indiens avec l’usage du Shehnai ou du Bansurî), et d’inflexions généreuses, par exemple sur « The Cherry Tree »). Son entente de chaque instant avec le leader et sa faculté de s’enrouler malicieusement autour de son jeu lumineux (« Serial Blues ») garantit l’indispensable unité du quartet.

Les compositions subtiles de Buronfosse cherchent toujours une profondeur étudiée. En témoigne le lyrisme de « Before the Second Round », où Moussay s’offre une emphase de synthétiseur. Pivot de l’album, cette pièce - ainsi que sa suite logique « After the Second Round » et son souffle apaisé comme après le combat, quand tout est un peu brumeux -, dévoile le propos d’un bel album où ce quartet aime à se colleter à la musique comme d’autres le firent, en d’autres temps aux moulins à vent.