Chronique

Martin Archer - Charlotte Keeffe

Hi res heart

Martin Archer (saxs, clars, harmo, fl, élec), Charlotte Keeffe (tp, bugle), Martin Pyne (vib, d, toy p)

Label / Distribution : Discus Music

Saxophoniste anglais, directeur artistique du label Discus, Martin Archer n’est pas du genre à se laisser contraindre par une pandémie mondiale. Confiné chacun chez soi, qu’à cela ne tienne, il continuera de faire de la musique et sortir des disques. Enregistré durant l’année 2020 avec une consœur et un confère britannique, Hi Res Heat témoigne de la capacité des musiciens à s’adapter à toute situation, fussent-ils, comme c’est le cas ici, des improvisateurs patentés.

Car Hi Res Heat, en dépit de son esthétique libre, se défie de la distanciation physique par un art de la combinatoire qui est aussi, faut-il le rappeler, une des composantes de la musique. Chaque membre a, en effet, composé et enregistré quatre idées musicales qu’il a fait parvenir à un de ses partenaires qui, à son tour, a ajouté ses propositions avant de transmettre l’ensemble au dernier. Le répertoire est l’addition de ces assemblages à entrées multiples.

Dans un premier temps d’écoute, on s’amuse à reconstruire le processus de montage des morceaux (la pochette du disque indique qui a écrit quoi et dans quel ordre) et on s’enthousiasme devant l’inventivité des créateurs capables de sonner de manière bluffante comme une œuvre collective captée dans l’instant. Très rapidement, pourtant, on laisse de côté ce jeu de re-création pour se laisser porter par les échanges qui utilisent un vocabulaire total (mention spéciale à la richesse timbrale de Charlotte Keeffe qui va du feulement à des accents New-Orleans) tandis qu’apparaissent des structures plus référencées qui entraînent le trio en territoire connu en apportant charme et contraste au déroulé général (le vibraphoniste, percussionniste, Martin Pyne est un élément nécessaire, tour à tour stable et modulaire).

Finalement, à quelque chose malheur est bon. On le sait : de la contrainte peut jaillir une grande liberté. De là à dire qu’on attend impatiemment le prochain virus, il y a un pas que nous ne franchirons pas.

par Nicolas Dourlhès // Publié le 19 septembre 2021
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