Chronique

Orties

Musiques de voyageurs enracinés

Lionel Rolland (g), Sylvain Nallet (cl, bcl), Patrick Cornut (perc)

Label / Distribution : Auto Productions

Venus d’horizons différents, du jazz aux musiques traditionnelles, les trois musiciens d’Orties signent avec Musiques de voyageurs enracinés un premier album rêveur et fureteur qui se balade en liberté entre Asie et Afrique sans oublier quelques détours par le sous-continent américain et les plaines d’Europe de l’Est.

Autour du guitariste Lionel Rolland qui passe avec aisance de la guitare sèche au oud, Orties aime à décrire des paysages sauvages restant à défricher. Sa musique dépeint des contrées métisses où le folklore est rendu imaginaire à force d’hybridations et d’étreintes. Ainsi, « Le peintre » qui ouvre l’album dans un dialogue amical entre le guitariste et l’excellent clarinettiste Sylvain Nallet [1] est un long périple qui nous mène de Perse en Inde sans pour autant se perdre en route ni même s’affadir. Il laisse au contraire le temps à chaque fragrance de prendre sa place et de se mêler, comme pour s’inventer à nouveau.

Trio de base du collectif bressan Palavanne (qui veut dire « De toutes les couleurs » en tamoul), Orties est comme un carnet de voyage dont les auteurs-musiciens, à peine lestés d’instruments voyageurs, ne se lasseraient jamais d’arpenter le monde. Leur soif d’espace les conduirait même à en inventer de nouveaux. C’est le rôle dévolu au très musical percussionniste Patrick Cornut, qui trace les lignes de fuite que les timbres très complémentaires de ses comparses colorent et transforment en paysage luxuriants. Par ailleurs créateur de percussions faits d’objets recyclés, Cornut sait distiller des ambiances parfois étranges, notamment lorsque la clarinette basse de Nallet vient apporter une rêverie doucereuse à l’ensemble (« Antonio et le fleuve »). L’humeur vagabonde de cet alliage très subtil de bois, de cordes et de peaux se laisse parfois aller à un humour enfantin assez proche de l’univers de Pascal Comelade (« Vacances aux Trousses »). La musique d’Orties permet surtout d’évoquer cette poésie rustique et lumineuse qui sied tant à ces citoyens du monde. De quoi se laisser tenter et suivre le périple.

par Franpi Barriaux // Publié le 19 mars 2012

[1Qu’on a pu apercevoir dans Les Défrichés, la fanfare du collectif L’Arbre-Canapas, les voisins de Bourg-en-Bresse.