Tribune

Philippe Schoonbrood, le militant du jazz

Le rédacteur en chef de Jazzaround nous a quittés brutalement ce 30 mai 2020.


Né en 1957 au sein d’une famille mélomane, il a vécu très entouré par la Great Black Music. De cette grande lignée, il s’est particulièrement penché sur le jazz, pour finalement devenir le rédacteur en chef du magazine Jazz Around.

Philippe Schoonbrood à Liège

En 1995, je lançais le magazine So What [1] et rapidement, j’ai eu entre les mains ce magazine marron et jaune avec des @ dans le titre : J@zz@round !
Naturellement, entre deux magazines gratuits francophones sur le jazz, il y avait des ponts à construire. Et j’ai rencontré et découvert Philippe Schoonbrood-Bartholomeus.

Un homme charmant, enjoué et très ouvert. La collaboration fut donc immédiate et évidente. Nous partagions les mêmes envies : plus de diffusion pour cette musique, plus d’Europe, plus d’échanges, moins de frontières, moins de repli sur soi, plus de partage.
Philippe et moi, J@zz@round et So What, Jazz Around et Citizen Jazz ont passé 25 ans à cheminer côte à côte.

De conversations en conversations, de partenariats en partenariats, on passait les années à parler musique, belgiques (je mets au pluriel), engagement politique et sirop de Liège.
Un jour, grâce à lui, et en vertu d’une longue histoire qui me lie à la ville, j’ai été promu Ambassadeur de la Province de Liège. Depuis, je reçois régulièrement les documents par la poste, dans l’enveloppe aux armes du Royaume de Belgique. Un mystère pour mon facteur.

Philippe était aussi un militant, syndicaliste, un homme de gauche, éveillé et toujours partant pour défendre des valeurs. Un homme de culture, un homme de partage.
Le jazz méritait d’avoir Philippe comme défenseur, comme promoteur.
Et Philippe méritait d’avoir le jazz comme ligne de vie.

Philippe Schoonbrood © Dominique Houcmant

On le savait malade, il m’en parlait à cause de la douleur, mais il continuait.
En mars dernier, il était sur le pont pour (une nouvelle fois) fabriquer une édition commune avec Jazz’halo, London Jazz News et Citizen Jazz et mettre en avant quatre musiciennes prometteuses. Il souffrait sûrement, discrètement, mais il se battait.

Un jour, en 2013, à propos du spectacle de Josse De Pauw « Old Monk », il a écrit : « Assis, le vieux moine raconte une vie subie, assumée avec difficulté ; quand il se lève, c’est un homme debout qui affronte le destin, interpelle, crie, avant de « danser un petit coup », au soir de sa vie, autour de minuit ».

J’ai plaisir à penser qu’il s’agit de lui.
Danse, mon ami, danse.

par Matthieu Jouan // Publié le 31 mai 2020

[1On y revient dès qu’il s’agit de préhistoire ou de saluer la mémoire des ancien.ne.s.