Chronique

Alexandra Grimal & Giovanni Di Domenico

Down The Hill

Alexandra Grimal (ss, voc), Giovanni Di Domenico (p)

Label / Distribution : Autoproduction

Cela fait désormais presque une décennie que le pianiste Giovanni Di Domenico et la saxophoniste Alexandra Grimal se laissent porter par le vent. C’est un vent chaud et doux, heurté comme il faut et toujours dans cette retenue qui permet toutes les accélérations. C’est le sujet de « Pneuma », où un piano très concertant accueille un soprano très disert, comme mille oiseaux de Messiaen. Le vent cesse de porter dans le désert, il fait vibrer les feuilles, il colporte le pollen, il fait danser aussi. Il reste néanmoins imprévisible, changeant, parfois même rempli de turbulences, à l’image de « Whispers and Songs » où la saxophoniste lâche son bec pour psalmodier profondément. Une autre vision des oiseaux.

La force de ce duo qui nous donne des rendez-vous réguliers, c’est de construire une musique rien qu’à eux, un point convergeant entre leurs univers respectifs, un pôle d’échanges fécond. « Kaali » en est un exemple parfait, qui commence avec une certaine urgence, une colère ou une excitation latente et se termine dans une concorde joueuse, où Di Domenico abandonne peu à peu son toucher brut et sa main droite si leste pour aller cueillir des essences plus chambristes dans un champ sauvage mais terriblement harmonieux. Down The Hill est un velours, un temps suspendu où l’on échappe à la pesanteur ; davantage sans doute que dans les précédents disques.

Down The Hill est un disque court. Une bulle qui englobe l’auditeur avec beaucoup d’empathie. Comme le vent au bord d’une plage, il rend tous les sons vaguement irréels et lointains, comme livrés tout entiers à la poésie. Di Domenico et Grimal s’accompagnent ensemble dans leurs évolutions réciproques, qui tendent vers une vision très contemporaine où la complexité alentour embrasse la fluidité avec une légèreté ingénue, à l’instar de « Voli Cosi », une fin aux faux-semblants opératiques qui nous rappelle la voix si magnétique d’Alexandra Grimal, à peine soulignée, comme un fard, par un piano ombrageux. Down The Hill est un souffle de liberté. Un dernier hommage au vent.