Foucher & Foussat
Chair Ça
Anne Foucher (vln, élec), Jean-Marc Foussat (synth, p, voc).
Label / Distribution : Fou Records
Fidèle à son synthétiseur AKS, Jean-Marc Foussat ajoute un chapitre à ses investigations dédiées à la musique électronique en compagnie de la violoniste Anne Foucher. Les deux s’embarquent dans une exploration contrastée en manipulant les sons qui donnent vie à Chair Ça. Plus qu’un dialogue en tête-à-tête, c’est une évocation de panoramas créés par l’imagination de deux musicien·ne·s qui s’installe par des formes ascendantes et descendantes.
Tout autant compositrice que violoniste, Anne Foucher déborde d’idées et réévalue le son et l’espace. Ses interventions apportent les nuances nécessaires à Jean-Marc Foussat afin qu’il contourne, illumine et plonge dans les volutes du violon. L’amplification joue un rôle majeur : cette musique est faite d’aspérités mais ne s’enrichit que par la progression incessante du canevas sonore. Après trois minutes, l’AKS mène la danse et se joue des lamentations propagées par l’archet. Des similitudes avec les dissonances pétillantes employées naguère au violon par Ornette Coleman esquissent des tensions lyriques. Une restitution de chœurs abstraits aux alentours de dix minutes accroît l’échange musical en y intégrant des variétés d’émissions sonores.
À l’instar des paroles de Gilles Deleuze dans la composition culte d’Heldon « Le Voyageur », il y a tout juste cinquante ans, la voix transcende le cheminement électronique dans « Nature du bonheur (L’Amateur d’aube) ». La voix d’une douceur exquise énonce le poème de Paul Nougé ; seuls des pizzicati évoquent par instant des cellules rythmiques et distillent un climat brumeux. Telle une oasis, l’incursion de ce texte détourne la perception auditive et régénère la suite musicale.
Des bruissements parsemés d’accalmies investissent la dernière partie de l’œuvre qui expose une expérimentation savamment construite jusqu’à la conclusion de Chair Ça.