Tribune

Anti-buzz consortium

A lire ce qui se passe sur Internet ces temps-ci, il me semble aujourd’hui nécessaire de prendre position sur un point précis : le buzz.


A lire ce qui se passe sur Internet ces temps-ci, il me semble aujourd’hui nécessaire de prendre position sur un point précis : le buzz.

Au départ anodin et plutôt amusant, le buzz (ce dont tout le monde parle, l’information chaude et croustillante, aussitôt avalée, aussitôt digérée) est sur le point de devenir le cancer de l’information.

Citizen Jazz fêtera ses dix ans l’année prochaine. Dix années de travail pour fournir une information sur le jazz et les musiques improvisées de qualité. Diffuser, promouvoir ces musiques et leurs créateurs, aiguiller l’auditeur, expliquer, raconter, montrer… avec une exigence et un sérieux qui nous valent d’être reconnus pour ce que nous sommes : un magazine d’information.

Les nouvelles techniques de diffusion de l’information, comme les réseaux sociaux et les flux d’actualité, ont eu un impact très important sur le mode de fréquentation de notre site. Autant, les années précédentes (jusqu’en 2009), nous avions un nombre important de visites dont une part non négligeable n’étaient en fait qu’erreur d’aiguillage - le système unique des mots-clés pour les réponses aux recherches sur Google etc amenait des visiteurs intempestifs - autant depuis 2009, les flux d’informations et les statuts de réseaux sociaux ont considérablement balisé le chemin. Aussi, aujourd’hui, n’avons-nous pas plus de visites - mais nos visiteurs reviennent plus souvent, consultent plus de pages et restent plus longtemps sur le site. Ce passage d’un lectorat quantitatif à un lectorat qualitatif nous oblige à apporter toujours plus d’attention aux informations diffusées.

C’est là qu’entre en ligne de compte le buzz.

Car le principe est simple ; faire le buzz est facile. Nos sources d’informations, automatisées et permanentes, nous fournissent de quoi alimenter une rubrique « buzz » minute par minute. Mais de quelles informations parle-t-on ? Pour faire le buzz, la nouvelle doit avoir au moins un intérêt croustillant, au plus une portée grand public, susceptible d’intéresser le plus grand nombre. Or, en matière de jazz et musiques improvisées, le plus grand nombre n’existe pas. Alors à quoi bon ?

Pourquoi dépenser autant de temps et d’énergie pour fournir une information aussi éphémère qu’inutile ? Une information que la rédaction, pour la passer en urgence et créer le buzz, n’a ni le temps, ni les moyens de vérifier – sauf à trouver d’autres sites qui buzzent à leur tour. Une information télécommandée la plupart du temps par un service de communication malin et équipé, une information qui souvent n’est qu’un moyen gratuit pour faire de la publicité.

Aussi m’apparaît-il important, avant de boucler notre dixième année d’existence, de revenir aux fondamentaux qui ont présidé à la création de Citizen Jazz : la passion pour le jazz et les musiques improvisées, la volonté de diffusion et d’information, le sérieux, le respect des musiciens.

C’est avec cette volonté que nous continuerons à exister, à proposer régulièrement un sommaire varié, à vous faire découvrir de nouveaux talents, de nouvelles productions. Nous resterons sourds aux sirènes mercantiles et aux trompettes mal embouchées de la renommée.

Et c’est avec cette volonté passionnée que nous pouvons sereinement envisager les partenariats avec nos voisins européens qui se battent pour la même cause.

No buzz ! So What ?