Chronique

Dennis Egberth

Första

Dennis Egberth (dms), Katt Hernandez (vln), Isak Hedtjärn (cl), Johan Graden (cla) Vilhelm Bromander (b)

Label / Distribution : Autoproduction

Pur produit de la scène suédoise, le batteur Dennis Egberth, que l’on a pu entendre avec Anna Högberg et qui participe au du trio Mambo Noir de Matti Bye [1] est de ces musiciens dont on comprend assez vite, à l’écoute d’un premier album, qu’ils vont compter à l’avenir. Batteur très ouvert et coloriste, dont le background va du Krautrock au Free, il livre avec Första un album très chambriste et onirique qui fait songer aux univers de Laura Schuller ; la présence de la violoniste Katt Hernandez, mais aussi du clarinettiste Isak Hedtjärn y est sans doute pour beaucoup, à l’image de la douceur qui gagne un morceau comme « Syrinx ». Avec une batterie qui s’installe pour mieux souligner les échanges et les dialogues, les timbres de ces deux musiciens s’apparentent à la voix et la discussion est sereine, comme dans « Magenta » où le piano de Johan Graden, repéré dans le somptueux Belle de Linda Oláh, vient donner ce qu’il faut de relief.

Le cœur piano/basse/batterie sait d’ailleurs reprendre la main quand il le faut, et si Graden et Vilhem Bromander à la contrebasse déchargent largement Egberth de ses tâches rythmiques, il sait reprendre sa place dans une forme plus traditionnelle (« Lophorina », où la rythmique plus carénée permet au piano et à la batterie de belles échappées et un certain lyrisme). L’important, dans Första (ce qui peut se traduire par « Debut », au sens anglais du terme), c’est de laisser libre cours à une légèreté revendiquée jusque dans les dissonances. L’influence de Satie est manifeste dans la simplicité mélodique que les interprètes ne tardent guère à s’approprier et à modeler vers des tendances plus abstraites ; notamment le violon, qui est avec la batterie le véritable régulateur de ce quintet.

La douceur de cette musique doit beaucoup à sa genèse. Jeune papa, Egberts profitait du sommeil de bébé pour composer mezza-voce sur son piano, dans la banlieue de Stockholm. Il en résulte une atmosphère duveteuse et pleine de surprises, comme ce « 180908 » aux allures de berceuse. Avec Dennis Egberth on découvre un musicien sensible et à l’imagination débordante. Un nom à noter promptement.

par Franpi Barriaux // Publié le 4 juillet 2021
P.-S. :

[1Matti Bye est l’auteur de la musique du film finlandais Tove, biopic de la dessinatrice des Moomins, où Egberth joue aussi et qu’on se languit de voir ici, NDLR.