Chronique

Drifting Box Celebration

Drifting Box Celebration

Sylvain Marty (dms, comp), Stéphane Arbon (b), Clément Glibert (cla, sax), Franck Pilandon (saxes), Alexandre Peronny (cello)

On connaissait déjà le jeune collectif auvergnat Musique en Friche pour sa fanfare Les Défrichés, dirigée par le contrebassiste Stéphane Arbon. C’est dans une autre formation, plus restreinte, qu’on retrouve ce dernier en compagnie d’autres membres du collectif avec Drifting Box Celebration. Emmené par le batteur Sylvain Marty, lui aussi de l’aventure fanfaronne, ce quintet, nourri à la musique improvisée la plus radicale offre une autre vision, plus ténébreuse, des Clermontois. Avec l’arrivée du violoncelliste Alexandre Peronny, ce qui s’appelait le quartet Bomek a finalement choisi pour nom les trois parties jouées dans cet album.

Drifting Box Celebration est un immense jeu de timbres dont la batterie serait l’implacable arbitre. Marty est le relais central des heurts et des rodomontades, des apaisements et des soudaines colères qui animent un orchestre fort symétrique. Les cordes, tout comme les soufflants (Clément Gilbert aux clarinettes et à l’alto et Franck Pilandon aux autres saxophones) décident des couleurs que le batteur tempère. C’est ainsi que sur « Drifting », première partie de l’album, donc, tout se découpe en saynètes exposant un propos plantureux et libre. Le quintet trouve son exutoire dans son très central cinquième mouvement. Sur une ligne de basse brillante d’Arbon, remarquable de bout en bout, le violoncelle de Peronny et le saxophone de Pilandon se jouent des masques et se confondent dans une belle harmonie. Encore une fois, ce sont les cymbales de Marty qui viendront interrompre cette fusion dans un soubresaut, réveillant la fureur d’un orchestre devenu soudainement très dense. Jamais on ne songe au chaos dans ce jeu continuel d’alliances impaires ; dès le premier mouvement de « Drifting », la paire Marty-Arbon insuffle une belle énergie à l’ensemble. Face aux harangues répétées des soufflants, campés sur l’archet agile du violoncelle, ils opposent une rythmique nerveuse qui visite parfois les confins du rock, pour finalement n’en conserver que la fougue. C’est sur « Box », seconde partie de la suite, que cette alliance en constant mouvement se transcende et expose par là-même la meilleur facette du quintet.

Dans l’ordonnancement des pièces comme dans le rôle assigné à chacun par l’improvisation collective, on perçoit chez Marty, l’unique compositeur, une solide culture musicale. De loin en loin, on reconnaît l’influence de Webern, notamment dans le goût pour les petites formes minutieuses (troisième partie de « Drifting »), où l’on aimerait parfois que le quintet s’abandonne plus à l’éclatement des structures. Drifting Box Celebration n’en reste pas moins un très agréable disque qui nous fait découvrir cinq jeunes solistes inscrits dans un collectif décidément très intéressant.