Chronique

Souchal/Marty/Martin/Schwarz

MétamOrphée

Nicolas Souchal (tp), Sylvain Marty (perc), Julien Martin (perc), Diemo Schwarz (elec)

Label / Distribution : Musique en Friche

Les Arbres ont bougé pendant la nuit constituait un disque qui célébrait la vieille entente entre les Auvergnats Sylvain Marty et Julien Souchal, tous deux membres du collectif Musique en Friche. Avec MétamOrphée, on retrouve le premier aux percussions et le second à la trompette, dans un univers tout aussi sombre et pernicieux, bien que jamais cataclysmique. Les bois se frottent, les peaux chantonnent, et l’embouchure frissonne comme des branches séchées par le soleil… Toujours la canopée. L’équipage a changé pourtant : on retrouve avec eux Julien Martin qui donne de la voix, comme ce pénétrant « Vif-argent » où les cris de chaman, vocalisation profonde bien que très gutturale, nous font pénétrer dans un domaine singulier. Le quatrième membre de l’orchestre n’y est pas étranger. Diemo Schwarz est un électronicien qui traite en direct les sons des instruments. Les tambours se dédoublent, la trompette est une tempête hésitante.

Métamorphose ? MétamOrphée ! C’est autour de la pièce d’Ovide que se construit cette atmosphère qui fait songer parfois à l’univers poétique de Jean-Marc Foussat (« Descente »). Les enfers de cette longue marche sont des boyaux éclairés de lumières vacillantes, et l’angoisse est latente, bien que déterminée. On ne se retourne pas, même si le souffle est sur la nuque de l’auditeur, qui s’immergera d’autant mieux dans ce conte musical sensoriel qu’il écoutera les paroles au casque. Raconter l’histoire avec des mots est inutile : toute la tension est là, jusque dans chaque remous de l’électronique.

Lorsque arrive « Eurydice », presque naturellement, dans un nuage, avec une lumière devenant de plus en plus claire, la trompette se dédouble, craque, se pare d’une certaine forme de magie, nécessairement noire. C’est là toute la force évocatrice de ces musiciens qui, avec un matériel simple et des trouvailles informatiques, parviennent à nous raconter une histoire antique et universelle jusqu’à la fin. Jusqu’au néant et son silence étourdissant par sa violence soudaine. Une expérience poétique totale.