Chronique

Favriou - Petit - Touéry

Favriou - Petit - Touéry

Fabrice Favriou (g, objets), Jean-Luc Petit (bcl, as, ss), Julien Touéry (p, objets)

Label / Distribution : Fou Records

C’est l’histoire d’une histoire à inventer. Elle pourrait se dérouler n’importe où, mais d’après l’image en noir et blanc qui l’illustre, partons de l’idée qu’elle est champêtre.

Tout est désert à priori mais si on s’interrompt un temps, on s’aperçoit que ça grouille de partout, que l’infiniment petit s’étale et joue des coudes. La stridence d’une fêlure interpelle, puis l’oreille se tend pour saisir l’instant tandis que l’instinct, dans sa réponse la plus primitive, ne cherche rien à assortir ou à harmoniser, mais cramponne à la vie. Et d’ailleurs la vie n’est pas harmonieuse, elle est faite de contraintes, de conflits, d’espaces à conquérir, c’est la vie. On se sent appelé à autant de vérité crue, alors on ressent le besoin de se déplacer à son tour, pour participer à l’improvisation qui agit. La fièvre nous a pris de toute façon, on n’a plus le choix, on est dans la scène, parmi la multitude. « La fièvre nous dénombre », elle crée un sursaut, des mouvements inopportuns mais nécessaires.

On n’a pas davantage le temps de chercher à comprendre parce que c’est la meilleure façon de passer à côté des choses, alors loin de toute considération, on suit le mouvement. On se confond au cœur de l’entité qui se débat dans l’urgence, qui se frotte à l’absurde quête de surtout rester dans cet incompréhensible état. On entrevoit Fabrice Favriou, il défie sa batterie sur une guitare qu’il froisse. « Au coucher de l’éclair », même pas inquiet, Jean-Luc Petit laisse sa contrebasse de clarinette prendre l’eau. Les chants du soufflant, sauvages, retentissent et font écho jusqu’à trouver des cordes martelées d’un piano, ouvrant une brèche dans laquelle s’est glissé Julien Touéry. Autour de nous ça gronde, on dirait que c’est grave jusqu’à la foudre. Tout s’accélère, tournoie, une immense tornade emporte tout, et ce chaos est d’un esthétisme fou. Les couleurs primaires se sont emmêlées, nous laissant le noir et le blanc.

Lorsqu’un dernier souffle éteint tout, on ne sait rien de ce qui s’est réellement passé, mais on se dit qu’il y aurait des myriades d’histoires à inventer et réinventer sur cette trame, et qu’en fin de compte, c’est sans fin.