Chronique

Hammerschlag, Bisio, Corsano

Trio

Arnold Hammerschlag (tp), Mike Bisio (b), Chris Corsano (dm).

Label / Distribution : Auto Productions

Trompettiste américain à la carrière commencée dans les années 90, d’abord à Seattle puis à New-York, on ne peut pas dire que la discographie d’Arnold Hammerschlag soit des plus étendues : son disque No Face, No Name date de presque dix ans, ce qui ne l’a pas empêché d’arpenter la scène aux côtés de Phil Haynes, Cuong Vu ou Jim Black. Avec un jeu incisif et proche de la rupture, volontiers puissant, on le retrouve dans cet enregistrement de 2019 en trio avec deux figures de la musique improvisée étasunienne, le contrebassiste Mike Bisio et le batteur Chris Corsano. L’alchimie est immédiate, le long « Little Symphony » inaugural est l’occasion d’apprécier le son franc et très affirmé de la trompette qui s’appuie sur le jeu d’archet bâtisseur de Bisio. C’est une entente qui permet d’affronter la mitraille de Corsano, dans un rôle qui lui est cher.

On avait rencontré Michael Bisio dans un duo saisissant avec Kirk Knuffke, et force est de constater qu’il a une certaine polarité avec les trompettistes. Pourtant Hammerschlag n’a pas la même approche de l’instrument que Knuffke ; dans « Long Arc » qui questionne l’urgence, alors que les pizzicati de Bisio soufflent avec Corsano des braises rougeoyantes et ne semblent jamais se tarir, la trompette joue peu mais avec autorité, semble maîtriser le déluge avec un calme qui ne masque pas une volonté d’aller chercher un point de rupture qui n’est jamais franchi mais flotte à proximité. Idem avec « Finale » où Hammerschlag échange avec ses compagnons dans une tension savamment entretenue.

Entre deux, le trompettiste, que l’on peut retrouver par ailleurs dans un très intéressant quartet avec Phil Haynes, nous aura offert deux discussions privilégiées avec ses musiciens. Si « Spanish » avec Bisio propose une version plus apaisée de leurs échanges, on découvre une autre dimension avec le justement nommé « Drums & Bugle » qui offre un dialogue profond de Hammerschlag avec Corsano au milieu d’un jeu très ouvert qui affirme un peu plus la complicité d’un très beau trio de fortes personnalités.

par Franpi Barriaux // Publié le 5 janvier 2025
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