Chronique

Imperial Orphéon

SEDUCERE

Gérald Chevillon (bsax), Antonin Leymarie (dm), Rémy Poulakis (voc, acc), Damien Sabatier (ss,as,bs)

Ecouter l’Impérial Orphéon crée une sympathie immédiate, au sens où, dès les premières notes, la musique transmet instantanément ses émotions, sa joie et son enthousiasme. Les prestations scéniques du quatuor ont jusqu’à présent réussi ce tour de force de rendre aussitôt familier son univers en proposant des compositions très travaillées, très recherchées et surtout diablement efficaces. En nommant “Seducere” son premier album après dix ans d’existence, le groupe donne à entendre effectivement un programme des plus séduisants. Toute la palette de ce que ces quatre musiciens peuvent produire sur scène s’y retrouve, à savoir un mélange explosif des genres et une indéniable incitation à la danse. Poussé par une rythmique atypique (batterie, saxophone basse et accordéon), l’Impérial Orphéon sait imposer avec brio des ambiances, les épaissir et les faire vivre tout au long d’un morceau. “Charousse Line” et “Le Cercle” en sont de bons exemples.

Le disque laisse aussi entendre le talent des individualités, et notamment l’originalité et la richesse du jeu d’Antonin Leymarie à la batterie. Ses incartades dans le monde de l’électro avec le Magnetic Ensemble ou dans celui du hip hop se font ressentir. Son fol entrain contribue grandement à l’énergie de l’ensemble avec l’aide de Gerald Chevillon au saxophone basse. Les envolées démoniaques de Damien Sabatier à l’alto procurent également de formidables moments de plaisir. Son solo sur « Le Cercle » est d’une remarquable puissance et balaye tout sur son passage. Avec son alto, il jaillit comme le diable enfin libéré de la boîte qui le retenait. Sa sonorité est vive, tranchante, et contraste à merveille avec la rondeur des basses.

Et pourtant, l’Imperial Orphéon a su se montrer plus expansif et plus cabotin sur scène. Choisir Seducere comme titre du disque n’est peut-être pas anodin. Ce latinisme est certes à l’origine du mot séduire, mais il signifie aussi « amener à part » et même « soustraire ». La séduction consisterait donc ici à retirer certaines parties de soi pour arriver à ses fins. Remy Poulakis peut être par exemple des plus volubiles sur scène, où ses envolées de ténor réussissent à entraîner dans la danse le plus récalcitrant des spectateurs. Ici le ténor deviendrait presque crooner. Sa voix change de registre et se fait feutrée, profonde, tendre. La séduction opère, différemment et pour longtemps.