Chronique

John Coltrane

Best Of

John Coltrane (sax), Thelonious Monk (p), Cecil Taylor (p), Paul Chambers (ctb), Johnny Griffin (sax), Sonny Clark (p), …

Au petit jeu des rééditions de l’œuvre de John Coltrane, dont la discographie foisonnante n’est pas des plus simples à décrypter pour le profane, on doute que cette compilation Blue Note aide les néophytes à s’y retrouver… et rejoigne les indispensables aux yeux des exégètes. Loin s’en faut !

Sur le principe, il s’agit en effet d’un triple CD regroupant des enregistrements réalisés par le saxophoniste pour le compte de Blue Note, principalement à une époque où il était sous contrat avec Prestige Records (de 1956 à 1958) et juste avant qu’il ne décide de rallier l’écurie Atlantic.
Dans les faits, on se trouve en présence d’un curieux mélange puisque le second disque comprend l’album Blue Train dans son intégralité, tandis que l’album Coltrane Time, enregistré en 1958 et une première fois publié sous le nom de Cecil Taylor en 1959 [1], compose une bonne partie du premier. Viennent s’ajouter quelques morceaux de Chambers’ Music ou Whims Of Chambers [2], de Sonny’s Crib [Publié par le pianiste Sonny Clark en 1957.]] ou de A Blowin’ Session par Johnny Griffin (1957), plus deux extraits d’une collaboration avec Thelonious Monk enregistrés live au Carnegie Hall en 1957 et, pour finir, une session en quartet avec le batteur Billy Higgins au mois de septembre 1960 [3].
Il y a de quoi s’y perdre ! On aurait voulu proposer un disque bricolé à la va-vite qu’on ne s’y serait pas pris autrement. En ces temps où le CD est un objet difficile à vendre, on s’interroge sur les raisons qui poussent un label à proposer au public un « produit » aussi mal pensé. Comme s’il s’agissait de se cacher derrière le nom de Coltrane pour s’autoriser tout et n’importe quoi. L’acheteur ne peut même pas se consoler avec un livret correctement documenté. Ici, il a droit au strict minimum et doit se contenter d’un tableau récapitulatif et d’un très court texte. Et il lui manquera une loupe pour lire les quelques informations qu’on aura bien voulu lui fournir.

Certes, la musique est magnifique, car cette époque permet de (re)découvrir un Coltrane encore en devenir mais déjà lyrique et volubile : son explosion est imminente. Mais on sera bien plus inspiré de passer son chemin et de se tourner vers les albums originaux et leur cohérence voulue par les artistes. Ils sont pour la plupart faciles à trouver, souvent à prix très raisonnable. Ils valent mieux que ce énième bricolage à visée commerciale !
En attendant, rêvons un peu : pourquoi pas une vraie intégrale des enregistrements de John Coltrane pour Blue Note ? Elle viendrait s’ajouter à celles déjà disponibles chez Prestige et Atlantic et inciterait peut-être Impulse Records à faire de même ! Ce jour-là enfin, on sera proche du but auquel aspirent ses aficionados…

par Denis Desassis // Publié le 4 janvier 2010

[1Avant que, trois ans plus tard, on ne le retrouve sous celui de Coltrane.

[2Enregistrés avec le contrebassiste Paul Chambers en 1956.

[3Publiée à l’origine sur le label Roulette.