Chronique

John Scofield

John Scofield

John Scofield (g, loop).

Label / Distribution : ECM

Les grands guitaristes prennent leur temps avant de se lancer dans l’aventure en solitaire. Après Biréli Lagrène et ses Solo Suites, voici venu le tour d’un autre monstre sacré du manche, John Scofield. Celui dont la « carrière » s’est envolée après son passage dans l’écurie de Miles Davis il y a une quarantaine d’années a, depuis, multiplié les aventures, entre jazz, rock et même country. Joe Lovano, Charlie Haden, Jack DeJohnette, Pat Metheny, Bill Frisell, Chick Corea, Herbie Hancock, Billy Cobham, Jim Hall, Joe Henderson, Brad Mehldau… Une énumération qui en dit long et pour le reste, une petite quarantaine d’albums au compteur discographique, faisant chez lui la démonstration d’une liberté et d’une ouverture d’esprit qui semblent presque sans limites.

Et voici notre homme qui, à 70 ans, s’offre seul une escapade intemporelle, entre standards revisités (« It Could Happen To You », « There Will Never Be Another You », « My Old Flame »), traditionnels (« Danny Boy », « Junco Partner »), rock (« Not Fade Away » de Norman Petty, né de sa rencontre avec Phil Lesh et la musique du Grateful Dead) et autres thèmes country (« You Win Again »). Sans oublier plusieurs compositions personnelles dont deux inédites. John Scofield – un titre d’une sobriété maximale – est un disque qui parle de lui-même, au point que le chroniqueur pourrait en rester là. Une guitare, une machine à boucles utilisée sans esbroufe et nous voici embarqués dans une échappée flottante, presque onirique, en une succession d’étapes au charme méditatif. Le voyage est d’une grande douceur, pour ne pas dire tendresse. On aurait de plus tort d’imaginer qu’il s’agit là d’un bilan ou d’un quelconque coup d’œil dans le rétroviseur. C’est au contraire un acte de naissance ici treize fois répété : celui d’un son tiré d’une corde, auquel ce maître de la guitare prête vie pour le faire chanter à chaque fois comme un hymne à la vie.