Nouveau venu dans la fédération Grands Formats, qui regroupe les grands orchestres de jazz hexagonaux, Lightblazer est une jeune formation emmené par le saxophoniste Jonas Muel (il signe la totalité des morceaux). Composé de jeunes musiciens habitués aux grandes formations - tels le saxophoniste Julien Soro et le vibraphoniste Stephan Caracci qui émargent également chez Ping Machine -, Lightblazer a les attributs fusionnels des groupes de sa génération. Sa musique pleine de groove coloré et de basses saignantes mélange allègrement jazz et rock avec une verve zappaïenne évidente, notamment lorsque le vibraphone se lance dans une joute échevelée avec la guitare volubile de Yoann Kempst au cœur de « V.G (Papillomavirus) », morceau où s’illustre également le trompettiste Julien Silvand.
Si l’on peut rapprocher le propos d’une formation comme LeBocal, surtout quand la base rythmique - le bassiste Guillaume Marin et le remarquable batteur Julien Goepp - porte à ébullition la marmite à grands coups de funk grasseyant (« Stick Up »), les musiciens introduisent dans leur potion un arôme naturel inédit, celui du hip-hop. La présence du rappeur centrafricain Edash Quata éclaire Le Laboratoire autrement plus chaleureusement que les habituels néons. Lorsque débute « Kickback », certainement le morceau le plus intéressant de l’album, on est projeté au début de ce siècle chez les Anglais de The Herbaliser ou de Nightmares on Wax. Flow remarquable, musicalité de chaque instant, le MC de Lightblazer est le moteur de cet album.
A l’instar de leurs aînés savoyards avec Ernie Odoom, les comparses de Jonas Muel ont trouvé avec Edash comment transcender leur énergie, la rendre plus « pop », taillée pour la sono mondiale de Radio Nova, sans perdre de vue la complexité. Ainsi, « Histoires de ruisseaux mélancoliques » et surtout « Une autre direction » montrent toutes les possibilités d’un orchestre qui ne s’interdit manifestement aucun terrain de jeu. On serait curieux de voir ce que donneraient ces morceaux avec Edah Quata dans un rôle d’instrument-voix. Comme sur tous les premiers albums de jeunes formations impétueuses, on pourra regretter la longueur de ce Laboratoire et sa volonté de trop en dire tout de suite. Cet enthousiasme a les qualités de ses défauts et laisse augurer d’un bel avenir, quand la matière aura décanté.