Scènes

Sweet Dog, Sortie confinée

Sweet Dog sort la puissance et la douceur avec un concert en streaming.


Babines au vent et toute rage dehors, Ariel Tessier, Julien Soro et Paul Jarret continuent leur route en trio. On avait apprécié leur premier round, disponible sur BandCamp, et le présent album, qui a déjà figuré dans notre magazine s’épanche à loisir en live. Soro, quand il ne farfouine pas dans son électronique, joue du ténor comme on creuse une tranchée, droite et profonde. Il trouve sur son chemin le drumming puissant de Tessier, et c’est autant de rocaille qui cherche à le dérouter. Néanmoins il caresse, il fait quelques entrechats, paradoxe canin pour évier la masse ; mais en live, dans un premier temps, c’est la puissance qui prime, d’autant que Jarret ne cesse d’étayer les excavations en cours par un jeu dur, trame rêche et pleine d’effets qui rappelle que le chien, s’il est doux et duveteux, détient avant tout des crocs fort acérés.

Ariel Tessier & Julien Soro - Copie d’écran

Et la douceur alors ? Elle vient dans les temps en suspens. Elle arrive sans prévenir : la puissance bouscule, elle bascule. Elle naît dans les paroles de Julien Soro qui parle de la période passée avec une pointe d’émotion ; elle se diffuse dans une musique gainée d’électronique. Jarret continue à encadrer le jeu. Le guitariste joue avec Jim Black  ? Ça tombe bien, cette musique farouchement improvisée le convoque régulièrement, sans pour autant s’inscrire autre part que dans l’instant.

Sweet Dog, c’est de la musique sans filet, qui n’a pas peur de se cogner aux grilles ou de bouffer le tapis, de faire des allers-retours entre gentillesse et férocité, mais qui tient toujours une ligne. Il n’est pas rare d’ailleurs que le ton monte, que les échanges soient rugueux et tiennent de la mêlée. Pour lancer son album, le trio a choisi d’aller à fond, de chercher l’acidité et la sécheresse qui les rapprochent souvent d’un power trio qui aurait fui le rock de peur de s’y ennuyer ferme. On ne peut que se réjouir de les voir s’épancher en liberté. Et pour ceux qui les souhaiteraient plus incarnés, il faudra attendre janvier au Triton ; et être parisien. Pour ce dernier point, on ne blâmera pas le virus…