Chronique

Olivier Benoît

Serendipity

Olivier Benoît, guitare

Label / Distribution : Circum Disc

Serendipity. Quel étrange terme : mélange de sérénité et de passion antique, prédiction enfumée d’une Pythie au langage onirique, il sonne comme un bouquet composite. Et de fait, l’ouverture du solo d’Olivier Benoît est double : à un arrière-fond horizontal et saturé s’ajoute le travail du grain de l’instrument. Mais quel instrument ? La guitare !

Elle est méconnaissable — on s’y attendait. Les expérimentations d’Olivier Benoît, d’Extenz’O à La Pieuvre [1] le laissaient présager. Ici, pas d’éclatement particulier mais, au contraire, un resserrement, un recentrage, une concentration enfin de la matière sonore, en trois suites anonymes. Les modulations de la première sont quasi imperceptibles, sortes d’échos lointains d’un instrument étranger. Puis, peu à peu, elles enflent et prennent la forme d’un souffle de vent qui ferait tinter un paysage urbain, peut-être industriel, peut-être souterrain. Le solo ondule en plusieurs corps le long d’une même corde, inéluctablement attiré par son centre névralgique, l’instrument.

Quels pourraient-être les titres des trois suites ? « Guitare 1 », « Guitare 2 », « Guitare 3 ». Ce n’est qu’elle et rien qu’elle. Et, en même temps, ce n’est pas elle. Si Olivier Benoît ne s’éparpille jamais en mille effets ni ne tombe dans la démonstration, il transforme néanmoins les sons, les malaxe, les développe, les invente. D’épaisses nappes de silence sont trouées par les éclats d’une guitare à la fois sereine et explosive, envoûtante et bruitiste. Comme les Préhistoire(s) d’Edward Perraud ou La Longue marche de Benjamin de La Fuente, Olivier Benoît détourne son objet premier pour aller chercher des sonorités jusque-là inconnues, et faire des découvertes inouïes — Serendipity, n. m. : heureux hasard, belle trouvaille.

par Raphaëlle Tchamitchian // Publié le 27 juin 2011
P.-S. :

Premier album solo d’Olivier Benoît, Serendipity a été enregistré live et est sorti chez Circum-Disc.

[1Christophe Rocher : clarinettes,
Olivier Benoît : guitare, Edward Perraud : batterie, Sylvain Thévenard : prise de son.