Otok
cabrioles cérébrales et accidents psychotiques
Yoram Rosilio (b), Hamza Touré (ts), Thomas Zielinski (g), Julien Catherine (dms)
Label / Distribution : Le Fondeur de Son
Il y avait quelque temps déjà que nous étions sans nouvelles du contrebassiste Yoram Rosilio. Un nouveau disque est toujours de bon augure, marquant souvent une étape dans la constante recherche de liberté qui signe sa musique. Avec Otok, nouveau quartet réunissant des figures de la scène parisienne comme le saxophoniste Hamza Touré ou le batteur Julien Catherine, Rosilio cherche une immédiateté qu’on qualifiera de nouvelle, à l’aune de ses anciens orchestres. cabriole cérébrale et accident psychotique - quel titre ! - commence droit devant, avec la sécheresse coutumière de la contrebasse qui s’allie à merveille avec un batteur qui aime le travail de fond, concentré sur ses fûts. « Kromagnon » en est l’emblème, mais cette base solide perdure par exemple dans « Afraid ! » où Catherine fait davantage parler la mitraille.
La grande nouveauté, et l’attraction principale d’Otok, c’est la guitare de Thomas Zielinski, qui trouve en Hamza Touré un allié de poids. Le saxophoniste sait user de la finesse, dans les contextes plus abstraits de « Afraid ! » ou encore dans le très colemanien « La Sérénade de Nelson », mais son rapport au cri est puissant et naturel ; Zielinski sait exploiter cela à merveille : dans le premier cas, la guitare se faufile, joue franchement avec la contrebasse de Rosilio qui signe toutes les compositions. Dans le second cas, il sait se faire chahuteur, revenant même aux sources d’un blues hendrixien dans les derniers instants de « Kromagnon ».
Otok, en croate, c’est paraît-il une île. Faisons confiance à ce grand voyageur qu’est Rosilio. Enregistré entre deux confinements dans son antre de l’Anis Gras à Arcueil en région parisienne, cabriole cérébrale et accident psychotique a toutes les caractéristiques insulaires : une solidarité posée comme principe et une identité forte. Le morceau final, justement nommé « Otok », en est un exemple probant ; la tournerie choisie par Rosilio permet à chacun des solistes d’exprimer leur personnalité sans quitter un noyau qui entre avec gourmandise dans une fusion free alimenté en carburant par une guitare furieuse. De quoi entrevoir la possibilité d’une otok, sans doute.