Chronique

RP Quartet

Poney Jungle

Bastien Ribot (vl), Edouard Pennes (g), Rémi Oswald (g), Damien Varaillon (b)

Label / Distribution : Frémeaux & Associés

Quatrième album au compteur pour ces jeunes et preux manoucheux. Un violoniste absolument perché, qui signe la seule et unique composition de l’album, deux guitaristes symbiotiques et un contrebassiste qui enrobe le tout de sa virtuosité bienveillante (Damien Varaillon sévissant avec éclat dans moult autres univers jazzistiques). En l’occurrence, il en faut de la virtuosité pour tenir les murs de la maison sur une version sans batterie (swing manouche oblige) de « Brilliant Corners » de Monk, ce morceau tellement tarabiscoté que le géant Oscar Pettiford dut jeter l’éponge (Paul Chambers ne put relever le défi qu’avec force collages).
C’est que ce groupe a pour ambition de manouchiser des standards hors du répertoire conventionnel défini par le Gitan Suprême et ses épigones. Le pire, c’est que ça marche. Au point qu’on verrait presque le violoniste Bastien Ribot surgir de son instrument, tant ce dernier semble possédé par quelque chose de plus grand que son musicien. Parfois, cela peut être l’esprit de Wayne Shorter, sur un « ESP » à tomber. Parfois, cela peut être plus simplement l’amour, qui pince les cordes de la guitare sur « Reincarnation of a Lovebird » de Mingus, ou qui déborde de l’interprétation de « Nefertiti ».

On ne peut que se faire embarquer dans cette mythologie du jazz qui convoque des perles rares composées, entre autres, par Billy Strayhorn ou Coltrane. Franchement, reprendre, sans saxophone, le thème « Like Sonny », composé par ce dernier en hommage à Sonny Rollins, est-ce bien sérieux ? L’humour n’est pas la moindre des qualités de RP Quartet. Le titre de cet album, clin d’œil au monument qu’avaient enregistré en leur temps Ellington, Mingus et Roach (« Money Jungle », 1962), est une invitation à les rejoindre dans leur cavalcade. Galopons avec eux sur leurs pistes improbables.