Chronique

Olivier Laisney & Yantras

Monks of Nothingness

Olivier Laisney (tp) ; Magic Malik (fl), Romain Clerc-Renaud (kb), Damien Varaillon (cb), Franck Vaillant (dm), Mike Ladd (rap)

Label / Distribution : Onze heures onze

Troisième disque en leader pour le trompettiste Olivier Laisney qui livre avec Monks of Nothingness la première référence de son groupe Yantras et confirme, dans le même temps, la place de choix qu’il occupe désormais parmi les musiciens importants de la scène actuelle. Se positionnant avec volontarisme dans le prolongement d’une modernité jazz issue des hybridations stylistiques de ces dernières décennies, son disque trouve sa forme dans une esthétique faite de contraintes fortes (modes à transpositions limitées d’Olivier Messiaen et taléas-colors empruntés à la musique polyphonique européenne du XIVè siècle) mais dissimulées, ou plutôt sublimées, par une spontanéité dans le jeu et une sensualité du son.

A partir d’un travail de production qui participe, en effet, entièrement du projet général, la basse puissante de Damien Varaillon prend le premier plan et charpente solidement l’édifice sonore. Quoique inamovible, elle est secouée en tous sens par la batterie polyrythmique de Franck Vaillant, véritable générateur d’énergie du quintet. Renvoyant aux matrices complexes entendues chez des groupes comme Aka Moon ou encore Octurn, la formation navigue ainsi dans un entre-deux où la précision du jeu n’empêche pas l’apparition de climats oniriques d’une grande clarté.

En la matière, les ambiances que posent les claviers de Romain Clerc-Renaud ou une trompette coloriste, astucieusement en retrait, apportent au ressenti général. Les interventions solistes s’imbriquent alors dans ces combinaisons algébriques collectives et s’élancent dans des topologies virtuoses où la flûte enjôleuse de Malik Mezzadri joue de complémentarité avec les lignes félines de Laisney. Les interventions du rappeur Mike Ladd sur plusieurs titres conduisent l’ensemble vers un hip hop composite et finissent d’apporter un supplément d’incarnation à ce disque absorbant et séducteur.

par Nicolas Dourlhès // Publié le 17 janvier 2021
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