Chronique

Schneider / Méchali / Couturier / Laizeau

Correspondances

Larry Schneider (ts), François Couturier (p), François Méchali (cb), François Laizeau (d, perc).

Label / Distribution : Charlotte Productions

C’est toujours une bonne nouvelle qu’une sortie affichant la présence de Larry Schneider, ténor américain trop discret depuis ses deux galettes gravées pour Label Bleu il y a une quinzaine d’années. Bien qu’on ait dernièrement pu l’entendre sur le premier album de Robin Nicaise (Hommage à Art Pepper sur Charlotte Productions, enregistré pendant l’été 99), Correspondances se donne d’emblée comme un disque bien plus personnel, recelant même quelque traces d’intimité.

Si Larry Schneider avait à l’époque un jeu déjà aisément identifiable, aujourd’hui il semble avoir gagné sur tous les plans, en nuances et en variété. A preuve : sa magnifique expressivité trouve sur bien des titres une authentique forme de gravité sensuelle servie par une science de la mélodie affinée jusqu’à en être ciselée. Mais dans ce travail d’orfèvre, rien de prémédité : l’élan improvisateur est intact, évident. Pas de doute, « correspondre » vient de « répondre ».

Du reste, la quasi-totalité des compositions de facture résolument moderne sont signées du quartette : pas de leader et peu « d’accompagnements ». Sur « Sens unique », le piano se met de bout en bout en scène par des impacts de cordes aux côtés d’un sax qui débute straight et envoie tout sans faiblir pour finir dans un cri de rage cuivrée aux accents de voix humaine : ici s’entend clairement combien le pianiste ne soutient pas mais libère. Avec « les Soldats » ou « Chasseurs de tête », François Laizeau habite le tambourin en le faisant danser sur le fil d’un groove millimétrique, tout en conservant l’oreille aux aguets.

La qualité des compositions ne fait pas non plus défaut. Les grilles brisées engendrent, l’air de rien, un morceau dans le morceau, sans rupture de continuité ; et c’est sans doute pourquoi les différents titres continuent à éveiller l’intérêt aussi bien dans l’instant que sur de la durée. Même remarque pour la globalité de l’album, d’une rare homogénéité, où les piécettes d’une minutes s’écoutent tantôt comme introduction à la piste suivante, tantôt comme histoire autonome : l’auditeur est libre, libre jusqu’au dernier temps - qui, avec « Histoire de », le laisse improviser la suite, en guise d’adieu. Jusqu’à cette prochaine fois qu’on attend déjà.