Chronique

Sylvain Guérineau & Fred Marty

Parodies

Sylvain Guérineau (ts), Fred Marty (b).

Label / Distribution : Creative Sources

Construits autour de calembours musicaux qui restent une forme toujours brute de poésie et de créativité, Parodies ne fait pas qu’éveiller un mouvement de sourcil à la lecture de « Aie l’air d’Albert » ou « Âme à cordes ». Le duo aguerri qui réunit le contrebassiste Fred Marty et le multianchiste Sylvain Guérineau s’inscrit également dans une longue tradition des formations basse/anches qui nourrissent l’histoire du jazz le plus libre. Fortement inspiré par Ayler et Dolphy, compagnon de longue date du pianiste François Tusques, Guérineau se retrouve dans son jardin dans cet échange avec le rugueux contrebassiste. Dans « Aie l’air d’Albert » justement, son ténor gagne en vitesse dans un chemin jonché d’embûches proposé par Marty, au pizzicato toujours très puissant, et c’est un duel intense, où la concorde n’est jamais loin, que proposent ces improvisateurs.

Auparavant, dans « Chaud Temps », Marty à l’archet avait proposé d’autres climats, plus mouvants, entre deux eaux : la réponse de Guérineau, plus caressante, cherchait un chemin différent mais tout aussi chaleureux, bien secondé par une contrebasse soudain plus boisée, offrant de la profondeur et un clair-obscur plein de douceur. C’est le but de ces Parodies proposées sur le label Creative Sources : sans rentrer directement dans les habits parfois élimés des figures suggérées, il s’agit de capter une forme de silhouette impalpable. Ces terrains de jeux, évoqués par un titre que l’on imagine évocateur pour les improvisateurs, servent ensuite de terrain à défricher, de boussole théorique. Ainsi, « Rollins Stone », morceau final et plus longue plage de l’album, est une pièce profonde et puissante où le ténor joue avec beaucoup de rondeur, explorant à la longue-vue les errances à l’archet de la contrebasse. Une très belle discussion entre amis.

par Franpi Barriaux // Publié le 12 novembre 2023
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